Je veille, tu veilles, il (elle) veille... de la veille documentaire à la veillée de contes ...

Résumé :

Il était une fois un fermier qui avait joué de malchance avec son bétail et ses récoltes. Tous ces malheurs l'avaient rendu très pauvre.
Un matin, alors qu'il était au jardin, un homme lui propose de retrouver sa fortune passée en échange de son premier enfant à naître, l'an prochain : le fermier doit rédiger un document das lequel il s'engage à le livrer ici même dans 21 ans, jour pour jour. Le fermier, qui n'a pas encore d'enfant, accepte sans se rendre compte de ce que cela va lui coûter comme remords. Aussitôt un sac rempli de pièces d'or apparaît et l'homme étrange disparaît.

L'année suivante, né un garçon. Le fermier comprend alors qu'il a vendu son fils au diable. Dès que son garçon fut assez grand, il l'envoya étudier au loin. A chaque vacances, son père le fuyait en poussant de gros soupirs. Une fois devenu adulte le fils interroge le père sur son comportement :
- Père, bien que tu m'aimes sincèrement, tu me fuis sans arrêt. Il doit y avoir une explication. Si tu ne me révèles pas le secret qui te tourmente, je nous ferai sauter la cervelle à tous les deux.
Le père se sent obligé de dire qu'il a vendu son fils au diable sans savoir ce qu'il faisait. Le fils ne parait pas inquiet :
- Si ce n'est que cela tu peux sécher tes larmes. Le diable ne 'attrapera pas si facilement.
Le fils va demander conseil à son professeur le plus savant qui lui donne un certain livre :
- Tu ne dois pas avoir peur du diable ; tant que tu liras ce livre, il ne pourra rien contre toi et avec le temps, il renoncera.

Au jour dit, le diable vient chercher le jeune homme. Mais le garçon était déjà en train de lire à voix basse et le diable ne peut l'attraper. Après plusieurs tentatives infructueuses le diable entre dans une telle colère qu'il donne une gifle terrible au jeune homme qui s'envole dans les airs et atterrit à 300 lieux de là, au milieu d'un bois. Devant lui est une femme enterrée dans le sol jusqu'au cou.
- Vilain diable, tu reviens me tourmenter ?
Le garçon promet de la débarrasser de ce diable. La femme lui indique où se trouve le château du diable.
Une fois arrivé au château, il s'éclaire avec 3 bougies enfoncées dans 3 bouteilles posées sur une table. toutes sortes de créatures grouillent autour de lui en gémissant et des serpents s’enroulent aux pieds de la table, mais le jeune homme continue à lire sans s'arrêter et dès que sonnent les 12 coups de minuit, le maléfice cesse. Le lendemain, il retourne voir la femme qu'il trouve enfoncée jusqu'aux aisselles. Elle lui demande de continuer mais qu'il se méfie cela risque d'être encore pire !
La deuxième nuit, le jeune homme allume 6 bougies et des animaux terrifiants le regardent en ricanant et bondissent sur lui mais sa lecture le protège. Aux 12 coups de minuit, tout s'arrête. Le lendemain, la femme n'est plus retenue dans le sol que jusqu'aux genoux.
La troisième nuit, le jeune homme allume 9 bougies et il règne un tel charivari autour de lui qu'aux 12 coups de minuit, le château se brise en deux morceaux. Le lendemain, la femme libérée vient à sa rencontre :
- Je m'appelle Béatrix et j'ai été reniée par mon père. Grâce à toi je suis libérée. Je possède aussi des pouvoirs magiques : je vais transformer cette forêt en une belle ville où nous habiterons si tu m’épouses.
Ils vivent là quelques temps mais un jour, le jeune homme veut revoir ses parents. Béatrix lui dit qu'ils partiront ds le premier tourbillon de vent. Un jour d'orage, elle prend un châle, l'étend par terre et ils s'installe tous deux. Avant de s'envoler comme des hirondelles, 1-2-3 !, elle recommande au jeune homme de ne pas dire à ses parents où et comment il l'a trouvée et délivrée. Mais la mère du jeune homme arrive à le faire parler. Aussitôt sa femme s'envole. Le jeune homme est accablé :
- Je m'en vais, vous me portez malheur !

Quelques jours plus tard, il croise 3 frères en train de se quereller pour un manteau et une paire de bottes. Comment partager en 3 ? Ces bottes peuvent couvrir 300 lieux en un seul pas et le manteau permet de se transformer en n'importe quel animal. Le jeune homme propose de les acheter pour qu'il partage la somme. Ils refusent. Il propose de les départager par une course : le premier gagera l'héritage. Il trace une marque pour le départ et va se poster au loin avec le manteau et les bottes qu'il enfile et il disparaît ! Le différend était réglé ...

Après avoir cherché longtemps Béatrix, le jeune homme se rend aux portes de la ville où il a vécu avec elle. Il apprend qu'elle est sur le point de se remarier. Béatrix essaye déjà sa robe de mariée ... Grâce au manteau magique il se change en mouche et se pose sur le miroir juste devant Béatrix. Il lui explique comment il est arrivé là et demande à Béatrix de poser cette question au fiancé qui ne va pas tarder à arriver :
- Il y a quelque temps d'ici, j'ai perdu la clé de ma garde-robe. J'en ai fait fabriquer une nouvelle, mais juste quand on me l'a apportée, j'ai retrouvé l'ancienne. Laquelle des deux me conseillerais-tu d'utiliser ?
Et le fiancé répondit ceci :
- Je me servirais de l'ancienne car je sais qu'elle fonctionne parfaitement, ce qui n'est peut-être pas le cas de la nouvelle.
- Eh bien alors, tu peux t'en aller car j'avais autrefois un mari, mais je l'avais perdu et je l'ai retrouvé aujourd'hui.
Le pauvre fiancé décampa et, si Béatrix et son mari ne se sont pas séparés, ils sont encore quelque part dans le ciel !

Illustrations :

• homme en noir : Méléagant, Kaamelott
• Matthias Stom, Jeune homme lisant à la lumière d’une chandelle. Matthias Stom (1600-1652) est un peintre hollandais qui passa une grande partie de sa carrière en Italie.
• cape magique : webmarchand.com
• bottes Largepas : http://fredthemeujeu.unblog.fr/category/objets-magiques/
• mouche : http://manmonster.centerblog.net
  

Sources :

• Le garçon vendu au diable, in : Maurice Lomré, Contes de Flandre, Neuf de l'école des loisirs, 2008. Les ciels de Flandre sont gris et la mer du Nord houleuse, mais l’humour qui souffle dans ce pays balaie toute mélancolie. Les Flamands rient d’eux-mêmes comme de leurs voisins. Tout leur est prétexte à inventer des blagues et à se les raconter, en flamand bien sûr ! Une langue qui a bien failli disparaître totalement au profit du français. Maurice Lomré connaît bien la Flandre. Il a réuni dans ce livre les contes les plus drôles qu’il ait lus ou entendus. Il a choisi également quelques beaux contes merveilleux où le rire a aussi sa place. Une belle princesse n’hésite pas à se moquer d’un prétendant fort courageux qui sent le poisson ou encore un héroïque jeune homme refuse d’enfourcher un cheval de feu et de flammes de peur de se brûler les fesses. Personne n’est épargné par ce rire ravageur, ni les puissants ni les pauvres, ni les Français ni les Wallons. Ni Dieu à qui saint Pierre réussit à faire croire que les poulets de Malines n’ont qu’une seule patte, ni même le diable qui devra renoncer à l’âme d’un bon lecteur… Note de l'éditeur.
• Source ancienne : Pol de Mont, Alfons de Cock, Wondervertelsels uit Vlaanderen uit de Volksmond opgeeeteekend, Thieme, Zutphen 1924.
  

D'autres contes :

• L'enfant loué au diable , collecte de Claude Seignolle, "Histoires et légendes de la Gascogne et de la Guyenne mystérieuses", éditions Sand, 1986, en ligne ici. Conté par Joris le 16 février 2013.
• Consulter l'article A... comme Apprenti : "L'apprenti du diable"