Dialogue avec un crane

Conte chinois :

lettré-chinois
Un lettré rencontre sur son chemin un crâne vide et l’interroge sur les circonstances de sa mort.

- Comment en es-tu arrivé là ? As-tu perdu ta raison dans la soif de vivre ?
Le crâne ne répond pas.
- As-tu provoqué la perte de ton pays et subi la peine de la hache ?'
Le crâne ne répond pas.
- Es-tu mort à cause de ta sale conduite ? As-tu couvert de honte ta femme et tes enfants ?

(en sortant sans masque pendant l'épidémie de corona ...)

Le crâne ne répond pas.
- Ou bien es-tu mort de misère, de froid, de faim ?
Le crâne ne répond toujours pas....
- Ou bien encore, es-tu mort de vieillesse ? ou peut-être de maladie ?

Et ainsi jusqu'à la nuit... Et le crâne ne répond toujours pas...
Le voyageur emporte le crâne avec lui, espérant qu'il lui réponde plus tard, ou que ce crâne lui apporte quelque sagesse et connaissance de la vie. Il s’endort avec le crâne pour oreiller.

La nuit le crâne lui parle en songe : Crane-chandelle-fleur-fruit
- Tu ne m’as dit que des paroles vides. Tu n’as parlé que des problèmes des vivants. Cela ne concerne pas les morts. Les morts n’ont pas de seigneurs, ni de serviteurs ; ils n’ont pas de saisons, ne travaux, ni femmes, ni époux, ni enfants. Ils sont en paix. Ils n’ont pas d’autre âge que celui du Ciel et de la Terre.
Le sage répond :
- Si j’obtenais du Gouverneur des Destins qu’il rende la vie à ton corps avec tes os, ta chair, ta mère, ta famille et tous les amis du village, refuserais-tu ?
- Renoncerais-je à mon bonheur royal pour retrouver toutes les misères humaines ?
Lorsque le sage s’éveilla, il prit le crâne dans ses mains et lui dit :
- Qui est heureux ? Qui est misérable ? Seuls, toi et moi, savons qu’il n’y a pas de vie et de mort.


Sources :

  • Jean-Claude Carrière, Le cercle des menteurs I, Chapitre 6 : La mort est notre dernier personnage. pp 138-137.


Un autre conte fait parler un crâne, mais pas toujours au bon moment ... Les conséquences dues à l'incompréhension de ceux qui gouvernent et croient tout connaître sont terribles ...

Conte africain : La parole

Parole et silence sont les personnages centraux de l'histoire africaine suivante. A la différence du lettré chinois, le pêcheur africain, homme simple et impulsif, cours informer le seigneur de sa découverte : un crâne qui parle !!!.

Résumé :

Un pêcheur trouve un crâne sur la plage
Qui t’a mis ici ?
La parole.
Le pêcheur épouvanté d’entendre le crâne parler, court au village, raconte son histoire et se retrouve devant le chef qui veut voir cela.
Mais sur la plage, le crâne refuse de parler … Le roi, furieux de s'être dérangé pour rien, tire son sabre et tranche la tête du pêcheur.
Alors le vieux crâne demande à la tête fraichement coupée
Qu’est-ce qui t’a conduit ici ?
La parole.


Sources :

  • Henri Gougaud, La parole, L'arbre aux trésors, Ed. du Seuil, conte d'Afrique noire.
  • A lire ici.
  • A écouter ici, conté par Henri Gougaud : un pur régal !
Tant que tu n’as pas trouvé la paix en toi, ne la cherche pas ailleurs.
François de La Rochefoucauld


La sagesse des cimetières

Résumé :
Un homme vint demander un conseil profond à Macaire l’Egyptien, un ermite, un saint homme connu pour sa sagesse et sa haute spiritualité.

Macaire envoie l’homme injurier les morts dans un cimetière.
L'homme le fait puis il revient voir Macaire. L'ermite l'envoie de nouveau visiter le cimetière pour dire aux morts des louanges.
Une fois cela accomplit, l’homme revient. Il attend que le sage lui explique quel enseignement tirer de tout cela...
Est-ce que les morts t’ont dit quelque chose ?
Non ...
Eh bien, voici mon conseil : Passe entre le mépris et la louange. Sois comme un mort.

Sources :

  • Jean-Claude Carrière, Le cercle des menteurs I, Chapitre 6 : La mort est notre dernier personnage. pp 137-138. tradition chrétienne.
  • Macaire signifie Bienheureux : http://religion-orthodoxe.eu/article-saint-macaire-le-grand-dit-l-egyptien-65298635.html
  • Pour en savoir plus sur Macaire, voir aussi : http://www.livres-mystiques.com/partieTEXTES/Philocalie/macaire.html )


Après la mort

Maitre, qu’arrive-t-il à l’homme éveillé après sa mort ?
Je n’en sais rien
N’êtes vous pas un homme éveillé ?
Oui, mais je ne suis pas mort.


Sources :

  • Jean-Claude Carrière, Le cercle des menteurs I, Chapitre 6 : La mort est notre dernier personnage. pp 134. conte zen.


Birds-pas encore mort-

Il vaut mieux être mortel

Le premier empereur de la dynastie Han gravissait une montagne. Il était entouré de ses fidèles ministres. Quand il arriva au sommet, l'empereur admira la beauté du paysage qui s'étendait à ses pieds et s'exclama :
Comme la nature est belle ! Mais malheureusement notre vie est beaucoup trop courte.
L'empereur cacha son visage dans ses manches et pleura. A sa suite, tous les ministres soupirèrent et versèrent des larmes.Seul l'un deux éclata de rire.
Comment oses-tu rire quand je suis si triste ? s'exclama l'empereur.
Si la vie était éternelle comme vous le souhaitez, l'empereur de la dynastie précédente ne vivrait-il pas encore ? Et s'il vivait encore, comment auriez-vous pu alors devenir vous-même empereur ?
En entendant ces mots, l'empereur sécha ses larmes.


Sources :

  • Lisa Bresner, Sagesses et malices de la Chine ancienne, Albin michel,2000, pp13-14, conte chinois.


Birds-Après la mort

Un monde au-delà de nos vies

Un soir dans l'atelier de Shonglang, le luthier. violon-automne_http://lecture-spectacle.blogspot.fr/2012/11/violon-automne-art.htmlIl fait doux, l'été s'éternise. L'apprenti, accroupi contre le mur rugueux, sous la lucarne ouverte, laisse aller la branche de frêne qu'il écorçait au couteau fin.
- Croyez-vous, mon maître, à la survivance des âmes au-delà du seuil de la mort ?
Sa voix est inquiète, menue, dans l'air qui sent bon le bois chaud.
- Hélas, je ne peux pas, répond maître Shonglang.
Il disperse quelques copeaux sur la volute de violon que creuse son ciseau pointu, reste rêveur, puis dit encore :
Pas plus que la goutte de sperme dans la matrice d'une femme ne peut croire en nos cathédrales, nos soldats, nos mendiants, nos villes, nos montagnes, je ne peux pas croire en un monde au-delà du nôtre, mon fils.

Sources :

  • Henri Gougaud, Le livre des chemins, Albin Michel, 2009, pp39-40.


Et pour en finir dans ce face à face avec la mort, le rire nous permettra de prendre un peu de recul.


Un conte et quelques réparties de Nasr Eddine, fou parmi les sages et sage parmi les fous, sont à découvrir dans le billet suivant : Face à la mort - Le rire.Cliquez ici.