Face à la mort - L'acceptation - Trois contes !
Par patricia gustin le samedi, mars 28 2020, 14:52 - CAFE-PHILO et Pop-Philosophie - Lien permanent
ACCEPTER la MORT permet de retrouver un peu de sérénité.
Certains se préparent à leur mort en rédigeant leurs dernières volontés bien avant d'être en fin de vie. C'est une manière d'organiser les choses pour eux-mêmes et la famille. Poser ses volontés, ses décisions sur papier donne l'illusion d'avoir encore quelque pouvoir face à la mort.
D'autres, plus fatalistes, se disent que la mort viendra lorsque leur heure sonnera ... Il est heureux que nous ne connaissions pas cette heure : ainsi nous pouvons vivre chaque jour sans penser à la mort, et mieux encore, vivre plus intensément chaque jour comme s'il était le dernier.
Petit rappel des étapes qui permettent d'accepter la mort pour ce qu'elle est :
- Le déni
- La peur
- Le refus
- La négociation
- La douleur, la tristesse, le désespoir
- L'acceptation : fin de la lutte et retour à la sérénité.
- La paix intérieure.
Trois contes :
Petis contes de sagesse mais non dépourvus d'humour, sur le grand âge et la mort.
- La mort d'Abraham, Jean-Claude Carrière, Le cercle des menteurs I, Chapitre 6 : La mort est notre dernier personnage.
- La vieille, Louis Hémon (1880-1913), France, La vieille, in La Belle que voilà.
- Le mât oublié Jean-Claude Carrière, Le cercle des menteurs I, Chapitre 6 : La mort est notre dernier personnage. Ce conte évoque l'imprévisible qui semble répondre au destin ; le destin peut avoir deux facettes comme si on jouait à pile ou face : C'était son heure / Ce n'était pas son heure. Cette pensée aide à se résigner, puis à accepter.
La mort à un âge avancé est plus facile à accepter, quoique ...
La mort d'Abraham
Selon la tradition arabe et la tradition chrétienne, Abraham est mort heureux et comblé de jours ...
La durée de la vie d'Abraham fut de 175 ans, puis il expira. Abraham mourut après une heureuse vieillesse, âgé et rassasié de jours, et il alla rejoindre les siens.(Genèse CH 25 : versets 7 et 8)
L'envie de vivre le tenait ... Dieu a dû ruser avec lui pour qu'il accepte de mourir.
Le Seigneur avait promis à Abraham de ne lui retirer la vie qu'au jour qu'il choisirait lui-même.
Or, Abraham devenu très vieux, ne manifestait en aucune façon le désir de quitter ce monde. Le Seigneur usa d'un stratagème. Il envoya un de ses anges, sous l'aspect d'un vieillard débile et tremblant. Ce vieillard vint en chancelant jusqu'à la porte d'Abraham, qui lui ouvrit.
- Abraham, dit le vieillard en laissant couler une bave jaunâtre des deux côtés de sa bouche, donne-moi quelque chose à manger.
- Tu manges encore ? demanda Abraham.
- Oui, je mange encore.
- Ne vaudrait-il pas mieux que tu meures plutôt que de vivre dans cet état de délabrement, de malheur ?
- Non, dit le vieillard, car je désire encore vivre.
Abraham haussa les épaules et, comme il gardait toujours en réserve quelque nourriture pour les affamés de passage, il la donna à l'ange déguisé. C'était une soupe, avec des pois chiches et du pain. Le vieillard s'assit à même le sol devant la maison d'Abraham et se mit à manger. Mais comme ses mains tremblaient fortement, il renversait la moitié du bouillon sur ses genoux. Des résidus de pain et de légumes tombaient dans sa barbe crasseuse. Il reniflait, il crachait, il pétait, de la morve coulait de son nez.'
- Abraham, dit-il d'une voix faible, aide-moi à manger.
Abraham, dont le coeur était charitable, ne put résister à cette requête. Il saisit le bol du mendiant et le porta jusqu'aux lèvres tremblantes. En même temps, il saisissait les pois chiches avec sa main droite et les enfournait dans la bouche sans dents. Il vit de près ce corps secoué de spasmes. Soudain il demanda :
- Quel âge as-tu ?
L'ange-vieillard leva vers Abraham son visage mal assuré, le regarda un instant et lui dit un âge légèrement supérieur - de quelques mois - à l'âge d'Abraham lui-même. Alors cleui-ci s'écria :'
- Seigneur, prends-moi avant que je ne devienne semblable à cet homme !
Il mourut à l'instant même.
Sources :
- Jean-Claude Carrière, Le cercle des menteurs I, Chapitre 6 : La mort est notre dernier personnage, tradition arabe, p .128.
- A lire en ligne ici
Illustration :
- Vieillard barbu au grand bonnet, avec les yeux fermés : Rembrandt, 1606-1669, Bibliothèque municipale de Lyon (N17REM002079)
La Vieille
Résumé :
Des « pauvres » se sont improvisés un mini musée de fortune dans leur maison : boulet, bombe, tunique, sabre... Mais le clou de la visite, c'est la vieille centenaire de cent sept ans qui attend désespérément de mourir et qui déclame son texte appris par coeur. Mais voilà, elle meurt. Et des richards qui s'en viennent. Vite ! Le Grand-Grégoire prend le corps du macchabée, le cache dans la grande armoire et demande à sa tante de quatre-ving-quatre de prendre la place de la centenaire.
Extrait : conclusion du conte :
(...) dans le fauteuil en face de l’âtre, la tante Ferdinand se débat contre son angoisse et cherche à se rappeler ce qu’elle doit dire. Et Grand-Grégoire qui se sent pas capable encore de réciter la leçon de tous les jours, reste stupidement adossé à l’armoire, les mains étendues à plat contre les panneaux, comme pour empêcher de sortir le secret sinistre qu’il y a enfermé.
S’il avait su... S’il avait pu deviner quel contentement infini la vieille avait trouvé dans la mort, et combien l’abandon du corps jeté là, sans respect, replié et tordu sur les couvertures et les pièces de cuir, la tête contre le bois de l’armoire, était doux à celle qui avait trop longtemps attendu !
Sources :
- Louis Hémon (1880-1913), France, La vieille, in La Belle que voilà
- A lire en ligne ici
Illustration :
- Vieille femme à sa fenêtre : www.tripalbum.net/andes/fille/
C'était son heure !
Le destin ? Le mât oublié
Résumé :
Les pêcheurs ont oublié le mât, ils retournent au port car sans mât, ils ne pourraient naviguer sous le vent et risqueraient le naufrage ; ils prennent aussi un vieux marin resté à quai. Le soir, on ne trouve pas le vieux pêcheur : une vague l'a emporté. Son jour était venu. Le bateau rentre avec la nuit et les hommes de l'équipage se disaient entre eux : Ce matin nous pensions que nous faisions demi-tour pour chercher le mât. C'était en fait pour chercher l’homme ; la mer le réclamait.
Sources :
- Jean-Claude Carrière, Le cercle des menteurs I, - Chapitre 6 : La mort est notre dernier personnage, conte irlandais, p .127-128.
Illustration :
- Yoal : bateau à rames et voile carrée. Il dérive de l'oselvar norvégien et est utilisé traditionnellement dans les îles Shetland. (Ecosse). Les yoals sont manoeuvrés à la rame par trois hommes maniant une paire de rames chacun. Lorsque le vent soufflait par vent arrière ou au largue, une voile carrée est hissée sur un mât en bois amovible. (Wikipedia)
La mort fait partie de la vie. Elle est notre dernier personnage ...
Comment rester en paix face à la mort ? Le billet suivant, Face à la mort - La paix intérieure, nous proposera des réponses par le biais de six contes courts. Pour les découvrir cliquez ici.