L'argent a travers l'histoire et quelques histoires ...

Note de l'éditeur :

Aujourd'hui plus qu'hier encore, l'argent gouverne en maître.
J'ai voulu comprendre pourquoi.
J'ai cherché et me suis lancé sur les traces de cette énigme.
L'argent, on l'adore et on le maudit tout à la fois.
J'ai découvert le règne de l'argent fou, de l'argent roi, de l'argent dieu. Et aussi un secret que, vers la fin, je me hasarde à délivrer.
J.-C. C.

http://www.usagold.com/images/gold-coins-bullion.jpegUne grande enquête, riche et documentée, où le talent de l'écrivain se conjugue au souffle du pamphlétaire.


Interview de jean-Claude Carrière :

Extrait de l'interview vérité mené par Thomas Sotto le 2 janvier 2014 - Europe 1 - 07:45 - En ligne ici ...

L'argent a d'abord été un outil avant d'être un dieu ou un maître, quelque chose pour servir aux échanges entre les hommes et les femmes. Et puis tout le monde est ravi quand il reçoit de l'argent. Quand il arrive à la maison, il est le bienvenu. Et pourtant, beaucoup de gens en ont dit du mal, et récemment encore,Romano Prodi, l'homme politique italien l'a appelé "l'excrément du diable". Comment se fait-il que cette chose si bienfaisante, que nous recherchons tous, soit maudite par tant de voix et dans beaucoup de cultures et de civilisations depuis longtemps ? C'était une question que je me suis posé. Pour cela, vous l'avez remarqué, j'ai essayé de faire une biographie d'un personnage. Moi, je suis un scénariste et un auteur dramatique, donc j'ai plutôt l'habitude de faire vivre des personnages. Alors j'ai pris l'argent comme un personnage, comme s'il avait vraiment, à un moment donné, pris vie. Étant d'abord quelques pièces d'or et d'argent. On ne sait pas très bien où et quand il est né.

Je ne suis pas du tout un prophète, surtout dans ces domaines-là. Je crois que nous allons vivre encore quelques temps dans cette douce illusion que l'argent est vivant. Et comme je le dis assez longuement dans le livre, il y a deux visions de l'avenir. Une qui dit : ce n'est qu'un accident, ces crises sont passagères, il faut continuer à consommer, à dépenser. Et l'autre qui dit : non, ce système est mort, il est fini, il faut le remplacer, passer à autre chose. Je pencherais plutôt pour la deuxième hypothèse. Mais naturellement, ça ne se fera pas dans l'année qui vient.


L'avis de Maryse :

Un livre curieux : l'auteur se place sur plusieurs registres dans le même ouvrage.

L'un très sérieux aborde :
a) les grandes étapes historiques
b) l'évolution des échanges donc l’adaptation de l'argent aux nouveaux marchés
c) les techniques financières

http://www.7sur7.be/static/FOTO/pe/3/2/12/large_707202.jpg Mais la fin est humoristique :
les économistes infatués de leurs théories les défendent malgré leur échec. L'argent meurt mais on l'aime tant qu'on attend et espère sa résurrection.


Decitre :

Pareil à un cambrioleur magistral, l'argent opère, parmi nous, depuis des siècles, par une lente, patiente et insensible infiltration. Par moments, bien sûr, le prix de ceci ou de cela nous surprend, on en parle peu, mais nous nous disons entre nous, pour nous rassurer, que cette folie ne durera pas. Pas du tout. Petit à petit, avec l'habileté d'un virus patient et voilé, l'argent nous imbibe. Il pénètre jusqu'à nos systèmes invisibles, jusqu'à nos nerfs les plus furtifs, jusqu'à nos vaisseaux capillaires. Il nous habitue à ses hausses brutales, à ses foucades, à ses caprices, à ses abandons, aussi. Nous croyons l'avoir gagné, nous croyons le tenir; pourtant, c'est lui qui nous possède. De sorte qu'il semble aux yeux de beaucoup comme une créature malfaisante et haïssable, une pieuvre qui s'entortille autour de nous, qui nous étrangle et de laquelle nous ne pouvons plus nous sauver. À moins que les millions de points d'attaque qu'il met en jeu dans son offensive moderne ne doivent plutôt nous faire penser à une fourmilière.


Chronique WEB de Victorine de OLIVEIRA :

L’essai de Jean-Claude Carrière consacré au nouveau dieu argent tient plutôt du pamphlet, avec tout ce que cela comporte de bons et de mauvais aspects. À la plume mordante et alerte, on reconnaît le scénariste et écrivain. Sur presque trois cents pages, pas le temps de s’essouffler entre vindictes, pointes d’ironie, accusations, anecdotes personnelles et regrets frisant le « c’était mieux avant ». (...) À lire Carrière, l’argent possède une vie propre, pense ses futures conquêtes, organise son propre culte. En dieu qui se respecte, il est même mort dans la nuit du 24 au 25 novembre 2013. (...) L’ennui, c’est que le marché se fiche allègrement de la morale. Adam Smith l’écrivait déjà au XVIIIe siècle, ce n’est pas le désir de bien ou mal faire qui motive l’acteur du marché, mais la cupidité. L’argent, lui, n’est qu’un outil, divinisé surtout par ceux qui n’en ont pas. Avec son essai, Carrière ne fait que consolider le socle d’une statue qu’il espérait pourtant renverser. Philosophie magazine