Je veille, tu veilles, il (elle) veille... de la veille documentaire à la veillée de contes ...

CONTES de CAILLOUX en chemin

Le lieu s'y prêtait ... dolmens, fossiles petites et grosses pierres, caillasse du Causse du Minervois, galets de la rivière au pied du Moulin d'Azam ...

Au second dolmen, après avoir écouté avec intérêt Marie qui a su faire remonter l'Histoire jusqu'à nous, je n'ai pu résister à l'envie d'enchaîner sur une autre histoire, ou plutôt un conte ...

Les trois tailleurs de pierres

Maintenant, vous savez tout (ou presque) sur les dolmens, leur fonction et leur construction ... mais que dire des hommes qui ont peiné pour tailler ces pierres dressées, casser tous ces cailloux qui, disposés sous des rondins de bois, ont aidé à faire glisser ces grandes dalles jusqu'ici ? Après l'Histoire, place à l'histoire des hommes, au conte ...

Le sage, le chaman, le prêtre-sorcier chargé d'entrer en contact avec les esprits protecteurs du clan, était chargé ce jour-là de visiter le vaste chantier de la future sépulture du chef. Il lui faut vérifier la bonne orientation des pierres et voir l'avancée de la construction. Il vient donc jusqu'ici, et observe les hommes qui y travaillent. Trois tailleurs de pierre disposant des mêmes outils, tapent, soufflent, transpirent et soupirent parfois pendant ce dur travail.
Le premier prépare des blocs de pierre. Les éclats forment petit à petit un talus qui recevra les plus grandes pierres. Il souffle bruyamment. Le chaman l'interroge. L'homme s'arrête, heureux de pouvoir faire une pause :
- Dis-moi, l'homme, ce travail avance-t-il bien ? Tout va comme tu veux ?
- Quel travail ! Ne m'en parlez pas ! Toujours à casser, déplacer, suer ... Et pour finir, j'ai seulement de quoi manger à la fin du jour ... Quel travail ! Ne m'en parlez pas ! C'est que je n'ai pas eu le choix, ordre du chef ...
Visiblement, cet homme-là, n'était pas très heureux.

Le sage, envoyé par le chef, laisse-là cet homme fort mais frustre et s'approche du deuxième tailleur de pierres :
- Dis-moi, l'homme, ce travail avance-t-il bien ? Tout va comme tu veux ?
- C'est dur, mais ça avance petit à petit ... Regarde, j'ai pu dégager un beau bloc de pierre de la falaise tout proche ... Bien sûr, c'est pénible, c'est fatigant, mais au moins je travaille en plein air et à la fin de la journée, la part qui me revient me permet de nourrir ma famille ...
- Bien, bien ... continue comme ça ...
Cet homme-là semblait résigné, un peu abruti par ce travail monotone, mais il n'était ni heureux ni malheureux.

Le chaman se dirige maintenant vers le troisième tailleur de pierres, en train de polir une pierre dressée, tout en chantant à voix basse.
- Dis-moi, l'homme, ce travail avance-t-il bien ? Tout va comme tu veux ?
- Oui, tailleur de pierres c'est une noble tâche ... Ah ! tailler ces pierres les positionner et les rendre lisses est un long travail qui demande du souffle et de l'endurance mais ces pierres sont sacrées : je construis une sépulture qui traversera le temps, qui durera bien après moi. J'ai même laissé mon signe tout en bas de cette pierre. Oui je suis fier de travailler ici.
Et sans plus attendre, il se remet à la tâche.
Cet homme là, lui, avait l'air franchement heureux car il savait donner du sens à son travail, tandis que la même tâche paraissait seulement épuisante, abrutissante, pour ceuxqui ne voyaient pas quel serait l'aboutissement de leur travail.

Petit Pierre, le Papè, et les petits cailloux

Petit Pierre passe quelques jours de vacances chez son Papé. Il le suit partout, et se régale de marcher à son pas en promenade. Le pas du grand-père est tonique, mais paisible. Il s'arrête souvent. Petit Pierre, toujours en train de sautiller et de faire des allers-retours, pense que c'est parce que son Papé est fatigué. Mais il s'aperçoit bien vite que son grand-père ne s'arrête pas parce qu'il a mal aux jambes, mais pour observer une fleur, écouter le chant d'un bec croisé, observer le vol en spirale des vautours, ou bien pour prendre le temps tout simplement de saluer les personnes qu'il croise en chemin. Et à chaque fois, avant de repartir, il ramasse quelque chose par terre ...
- Tu as perdu quelque chose, grand-père ?
- Bien au contraire : j'ai trouvé quelque chose ...
Petit Pierre est intrigué, et observe avec plus d'attention le manège de son grand-père. Il ramasse des petits cailloux... Alors Petit-Pierre en ramasse aussi ... ils vont peut-être faire un concours : qui aura ramassé le plus beau ???
Au retour de la promenade, le Papé sort un après l'autre les petits cailloux ramassés... Il les dispose soigneusement sur la toile cirée de la table de la cuisine. Lentement. Un après l'autre. Avec un petit temps de silence entre chaque petit caillou extirpé délicatement de son vieux pantalon aux poches déformées. Avec un sourire au coin des lèvres. Parfois un doux soupir. Parfois un large sourire. Puis, il range un à un ses cailloux dans un bocal transparent.
Petit Pierre interroge son grand-père. Qui ne répond pas. Et le même rituel revient chaque jour après la promenade. Sans paroles. Sans explications.Petit Pierre est de plus en plus intrigué.
Le troisième jour, Petit Pierre n'y tient plus : au moment du grand déballage, il demande à son grand-père de lui expliquer pourquoi il fait ça !!!
- Ah ! Tu n'as pas compris ? As-tu remarqué à quel moment je ramasse ces petits cailloux ?
- ... Tu t'arrêtes, tu regardes autour de toi, ou tu parles à quelqu'un, puis tu prends un petit caillou avant de repartir ...
- Oui, tu as bien vu... Ces petits cailloux, je les ramasse pour ne pas me perdre ...
- Comme le Petit Poucet ?
- Un peu. Mais ce n'est pas pour les semer sur le chemin. Au contraire, je les garde précieusement. Et le soir, en sortant un petit caillou, me revient en mémoire le petit bonheur qui m'a fait le ramasser. Tiens, celui-ci : c'est quand j'ai respiré une rose qui dépassait du mur du voisin. Celui-là : c'est quand notre voisine qui travaillait au jardin a relevé la tête et nous a souri. Cet autre : c'est quand le gros chat roux est venu vers moi et s'est laissé caresser. Ce tout petit, c'est le chant de la fauvette, celui-là le vol d'un oiseau. Ce tout lisse, tout doux, c'est pour me rappeler la douceur de ta petite main dans ma grosse paluche ...
Et ainsi de suite, chaque caillou a livré son petit secret, son petit bonheur sur la toile cirée de la table de la cuisine. Et au fur et à mesure, les traits du Papé se détendaient, le sourire arrondissait ses lèvres, ses rhumatismes l'oubliaient, la gaieté de sa jeunesse revenait. Ces petits cailloux, comme autant de petits bonheurs, c'était cela son secret qui lui permettait , malgré quelques rides et quelques raideurs, de garder le sourire, l’œil vif et brillant de sa jeunesse ...

Nous avons continué notre randonnée, observant, devisant, échangeant ... et descendant les gorges de la Cesse. (Merci à Aurélien qui m'a aidé à garder l'équilibre grâce à son épaule charitable). Au pied du moulin d'Azam, le lit de la Cesse était à sec, mais pas nos saquets ni le sac de contes. Après un agréable pique-nique au soleil, quelques contes de cailloux, galets obligent, ont bercé nos oreilles...

J'espère que vous avez ramassé beaucoup de petits cailloux en chemin ... voici quelques idées pour les utiliser ... Si vous en avez beaucoup, deux ou trois, ou même un seul, il y a de quoi faire, au moins dans les contes ...

Le professeur et les cailloux

Petit Pierre qui aimait tant ramasser des petits cailloux avec son grand-père est devenu grand. Il est maintenant instituteur. Et il doit enseigner à ses petits élèves comment s'organiser d'une manière efficace pour faire leurs devoirs... en un mot comment choisir les tâches prioritaires et gérer leur temps. C'est bien compliqué pour ces petites têtes. Déjà que c'est difficile pour les adultes ... Et il n'a qu'une heure pour "faire passer la matière"... Il se doute bien qu'il aura du mal à intéresser ces jeunes élèves ... Alors il décide de tenter une expérience ...
Le lendemain, il dépose sur son bureau un gros bocal en verre, genre bocal à poisson rouge ... Là, il voit une petite lueur d'intérêt dans les yeux des enfants...
- Aujourd'hui, au lieu de nous contenter d'explications théoriques, nous allons faire une expérience pratique.
Les élèves se redressent sur leur chaise, tout de suite intéressés.
Le professeur commence à étaler sur le bureau des galets de diverses tailles.
- Comment disposer ces galets dans le bocal pour en faire rentrer le maximum ?
Quelques doigts se lèvent : Un par un ... et le premier de la classe répond : Il faut mettre les plus gros d'abord !
Le professeur place les plus gros galets au fond et rempli le bocal jusqu'en haut. Lorsque le pot est rempli jusqu’au bord sans qu'il soit possible d’y ajouter un caillou de plus, il lève lentement les yeux vers ses élèves et leur demande :
- Est-ce que ce pot est plein ?
Tous répondent : Oui !
Le professeur attend quelques secondes et ajoute : Vraiment ?
Il sort de sous la table un récipient rempli de gravier. Avec minutie, il verse ce gravier sur les gros cailloux, puis brasse légèrement le pot. Les morceaux de gravier s’infiltrent entre les cailloux jusqu’au fond du pot. Il lève les yeux vers son auditoire et, à nouveau, pose sa question :
- Est-ce que ce pot est plein ?
Cette fois, ses brillants élèves se doutent de quelque chose. L’un d’eux répond :
- Probablement pas !
- Bien ! répond l'instituteur et, cette fois, sort de sous la table un sac de sable. Avec attention, il verse le sable dans le pot. Le sable remplit les espaces entre les gros cailloux et le gravier. Encore une fois, il pose sa question :
- Est-ce que ce pot est plein ?
Cette fois, sans hésiter et en chœur, les brillants élèves répondent : Non !
- Bien ! répondît l'instituteur. Et comme l'avaient deviné les élèves, il se penche ... et prend sous la table un pichet d’eau. Il remplit le pot jusqu’à ras bord. Le prof lève alors les yeux vers son groupe et demande :
Quelle grande vérité nous démontre cette expérience ?
Pas fou, le plus audacieux des élèves, se rappelant le sujet de ce cours, répond :
- Cela démontre que même lorsque l’on croit que notre agenda est complètement rempli, si on le veut vraiment, on peut y ajouter plus de rendez-vous, plus de choses à faire
- Non répond l'enseignant, Ce n’est pas cela. La grande vérité que nous démontre cette expérience est la suivante : si on ne met pas LES GROS CAILLOUX EN PREMIER dans le pot, on ne pourra jamais les faire entrer tous, par la suite
Il y eut un profond silence ...
- Quels sont les gros cailloux dans votre vie ? Votre famille ? Vos ami(e)s ? Votre santé ? Réaliser vos rêves ? Faire ce que vous aimez ? Apprendre ? Défendre une cause ? Vous amuser ? Prendre le temps... ? Ou... tout autre chose ? Ce qu’il faut retenir, c’est l’importance de mettre ses GROS CAILLOUX en premier dans sa vie si on veut bien remplir et réussir sa vie. Sans but réfléchi, sans objectif, on donne priorité aux petites choses peu importantes, ni indispensables ni essentielles pour construire l'avenir : on remplira sa vie de grains de sable, de gravier et on n’aura plus suffisamment de temps précieux à consacrer aux éléments importants de sa vie.
Un élève, plus observateur que les autres, lève le doigt :
- Monsieur, et l'eau ? Pourquoi avez-vous mis de l'eau par dessus les cailloux ?
- L'eau ? C'est pour vous rappelez que même si on a une vie bien remplie, il reste toujours le temps de prendre un thé, un café, ou un verre de pastis avec ses amis !

Alors, où en êtes vous avec vos gros cailloux ?

Deux cailloux : un noir et un blanc

Le cordonnier vit chichement, au jour le jour, avec sa fille. En face de son échoppe est installé un riche marchand, tellement riche qu'il ne travaille plus de ses mains mais fait travailler son argent. Il prête de petites sommes, mais avec intérêt. Et des intérêts qui deviennent énormes au fil des semaines et des mois. Le cordonnier s'est bien juré de ne jamais, jamais, ô grand jamais, lui emprunter quoique ce soit !
Mais les affaires sont tellement ralenties, alors que tout augmente, que bientôt il ne sait plus que faire : il faut tout de même que sa fille puisse manger à sa faim. Alors il fait ce qu'il s'est juré de ne jamais faire ... ces serments-là ne tiennent que quand tout va bien ... Il finit par traverser la rue, il frappe à la porte du riche commerçant qui le reçoit avec un sourire en coin, tout en se frottant les mains : le cordonnier emprunte une somme dérisoire, juste pour finir le mois, et il rendra tout dès le mois prochain ! Mais les affaires ne vont pas bien, ni le mois suivant, ni celui d'après... Un an est vite passé. C'est au tour du riche commerçant de traverser la rue et de frapper à la porte du cordonnier. Mais ce n'est plus 100 pièces qu'il faut rembourser, mais 1000 pièces !!! Le cordonnier est accablé. Il ne pourra jamais rembourser une telle somme. Même en vendant le peu qu'il possède. Il va tout perdre, le riche commerçant va se saisir de sa pauvre boutique ...
Sa fille trouve son père bien soucieux. Elle le questionne. Il finit par lui confier son problème. La jeune fille est aussi intelligente qu'elle est belle, et vous le savez bien : les filles sont vraiment très belles dans les contes. Elle réfléchit et décide d'aller négocier la dette de son père auprès du riche commerçant. Elle se prépare, se coiffe, se pomponne, se parfume, met sa plus belle tunique et ses sandales dorées ... Elle traverse la rue et frappe à la porte du riche commerçant. Un serviteur lui ouvre la porte et la conduit auprès du prêteur sur gages. Il est en train de se reposer dans son jardin magnifiquement entretenu par son jardinier : pas un brin d'herbe plus haut que l'autre, des allées de petits galets, des fleurs splendides, une fontaine au doux murmure... Le riche commerçant dévore des yeux cette jolie fille ... Elle se présente : elle vient négocier la dette de son père. Il n'est pas possible de lui saisir son échoppe, ses outils, le peu de cuir qui lui reste : c'est son gagne-pain !
- Je comprend, susurre le commerçant en dévisageant la jeune fille de haut en bas et de bas en haut, mais qu'as-tu à proposer en échange ?
- Un pari ! Un pari pour jouer la remise de dette de mon père et je jouerai aussi ma personne dans un tirage au sort ...
Le commerçant se redresse, tout à fait intéressé ... Et comme il n'est pas du tout décidé à laisser partir cette jolie fille de son jardin, il propose tout de suite un tirage au sort avec ce qui lui tombe sous la main, des petits galets de son jardin :
1) Si elle pioche le caillou noir, elle devient son épouse
et la dette de son père est effacée.
2) Si elle pioche le caillou blanc, elle n’a pas à l’épouser et la dette du père est également annulée.
3) Si elle refuse de piocher un caillou, son père est jeté en prison.
Le commerçant se penche et saisit rapidement deux cailloux qu'il glisse dans une bourse. Mais la fille a l’œil vif, d'autant plus qu'elle sait qu'elle a affaire à un escroc professionnel ! Et elle a vu ... Elle a vu qu'il a placé deux cailloux noirs dans le sac ....
Si on analyse bien, il y a 3 possibilités :
1) La fille refuse de piocher un caillou parce que le tirage au sort est truqué ... mais dans ce cas son père va en prison ...
2) La fille accepte de piocher un caillou et dans ce cas se sacrifie car le caillou sera noir : elle devra épouser le commerçant pour libérer son père de sa dette
3) La fille sort les deux cailloux du sac pour démontrer la tricherie ... et le pari sera annulé. Mais sans nul doute le commerçant trouvera un autre piège ...
Après avoir bien réfléchi, la jeune fille accepte le tirage au sort, prend un caillou mais le laisse tomber .... et le caillou se confond avec tous les cailloux du jardin ...
-Oh ! Que je suis maladroite ... il m'a échappé ... je l'ai perdu ...
Le commerçant se fâche, crie à la tricherie, tempête, veut garder la jeune fille ... Mais, elle, sans se démonter, répond ceci :
- Mais non, ce n'est pas si grave ! Il suffit de regarder le caillou qui reste dans le sac et on saura lequel j’avais pioché en premier !
Le commerçant n'est pas content du tout, mais il ne peut rien dire, sinon il devra reconnaître qu'il a triché. La jeune fille sort le deuxième caillou ... un caillou de couleur ... noire ... Puisque le caillou restant est noir, le premier caillou pioché ne pouvait être que blanc !!! Elle peut rentrer librement chez elle et la dette de son père est annulée.
A défaut de changer les choses, grâce à son regard neuf, la jeune fille avait su contourner le problème, en imaginant et proposant une solution. Elle a ainsi transformé une situation qui semblait impossible en un dénouement fort avantageux. A chaque problème sa solution, il suffit de regarder les choses sous le bon angle...

Un seul caillou : une soupe

Manu nous a donné sa recette :

Au Portugal, il existe une fameuse recette : "La soupe au caillou". D'accord ! il ne faut pas être difficile ... C'est meilleur avec du lard ... et puis on peut y ajouter aussi quelques petits légumes qui s'ennuient dans le garde-manger : une carotte, un oignon, une pomme de terre, quelques haricots ... enfin, ce qu'on trouve. Pour finir on obtient un minestrone. Mais au moment de servir, attention ! Un caillou dans une assiette de porcelaine ... ça risque de casser ! Alors on met le caillou de côté et on le garde pour la prochaine soupe ! Vrai, de vrai, on met bien un caillou au fond de la marmite !

Vous trouverez d'autres "recettes" dans le billet "Soupe de contes"

Beaucoup de cailloux ? Beaucoup de pierres ? Pariez avec le calife !

S'il vous reste beaucoup de gros cailloux ... c'est que vous n'avez pas bien écouté le professeur ... mais ils peuvent faire l'objet d'un pari ...

Le Calife a une passion, faire des paris … surtout quand il est sûr de gagner ! Et pour aider la chance et ne prendre aucun risque, il fixe lui-même les termes du pari. Alors, bien entendu, les courtisans trouvent mille prétextes pour éviter de jouer avec lui. Il se trouve maintenant réduit à parier avec ... des commerçants, ... ses femmes ... les gardes et même les serviteurs...
Un matin, à l'occasion de travaux dans son palais, un tas énorme de pierres est entreposé dans la cour du palais. Trois ouvriers s'affairent pour transporter ces pierres sur le lieu de construction. Cela donne une idée au Calife : il parie dix jarres d'or avec qui voudra, que ce travail soit fini à la fin du jour... Tout le monde baisse la tête... Seul un jeune maçon relève le défi mais demande l'ajout d'une clause : en cas d'abandon du Calife, il obtiendra en dédommagement une jarre d'or. Par contre, souligne le Calife, si le maçon perd son pari, il perdra aussi sa tête …
Et le pari commence, le maçon transporte ce tas énorme, pierre par pierre, tout en gardant le sourire … sûr de gagner, ce qui inquiète de plus en plus le calife, pourtant sûr qu'il est matériellement impossible pour un seul homme de déplacer toutes ces pierres en un seul jour... Tu as oublié une chose toute simple … lui répond le maçon..
Le Calife s'interroge, le Calife s'inquiète et fait les cent pas. Il revient voir l'avancée du travail toutes les heures ... Le jeune maçon est toujours souriant. Le Calife convoque ses conseillers, puis les mathématiciens de la cour qui font de savants calculs concernant la masse de pierre à déplacer, ce qui a été déplacé, ce qui reste à déplacer, la vitesse du déplacement, etc. Le Calife devrait gagner. Alors quelle est la chose toute simple qu'il a oublié ? Il convoque les astrologues, surveille le jeune maçon toujours souriant, toujours sûr de gagner ... Le Calife ne tient plus en place, le Calife s'énerve, le Calife n'en peut plus ! Il veut savoir ! Il n'a encore jamais perdu, alors qu'elle est cette chose qu'il a oublié ? Le Calife est à bout ! Qu'a-t-il oublié qui risque de le faire perdre ? A la huitème heure, il arrête le travail du jeune maçon :
- Qu'ai-je oublié ?
- Décides-tu d'arrêter le jeu ? ...
- Oui ! J'arrête ! Mais dis-moi, je te le demande, quelle est cette chose très simple que j'ai oubliée ?
Le jeune maçon pose sur le sol les pierres qu'il transporte, et posément explique sa situation :
- Tu n'as pas prêté assez d'attention à la condition supplémentaire que j'ai posée. Tu n'as pas saisi que moi je jouais pour une jarre d'or et toi pour dix jarres d'or en échange du transport complet des pierres.
- Mais comment as-tu fait pour gagner ? Quelle est cette chose très simple que j'ai oublié ?
- Tu as oublié la plus simple des choses : tu as oublié que tu pouvais perdre confiance en toi-même ...
Le Calife resta silencieux. En effet, bien trop pris par sa passion du jeu et trop confiant en sa propre perception des choses, le calife n'a pas su voir la stratégie du maçon : le jeune homme avait une telle confiance en sa réussite que cela a servi de levier pour faire monter le doute dans l'esprit de son adversaire.
Le jeune maçon saisit la jarre d'or intelligemment gagnée, la chargea sur son épaule, traversa la cour entre les deux tas de pierres, un grand et un petit, et s'en alla loin très loin dans un autre royaume.

POUR EN SAVOIR PLUS :

Sources des contes :

• Les trois tailleurs de pierres, un conte adapté du court récit attribué à Charles Péguy qui, en route vers la cathédrale de Chartres, croise en chemin trois ouvriers : le premier est accablé par son sort misérable, le second s'en accommode faute de mieux car il travaille pour nourrir sa famille et le troisième est heureux de participer à la construction d'une cathédrale. A lire ici : Quel tailleur de pierres êtes-vous ?
• Les petits cailloux un conte entendu lors d'une réunion des conteuses de l'Aude : la conteuse le tenait de son petit-fils qui l'avait entendu en classe de la bouche de son instituteur ... une fois de plus, les contes sont fait pour être partagés, donnés et semés en chemin comme des petits cailloux, pour qu'on ne se perde pas en chemin ... (voir l'article B... comme bonheur)
• Le professeur et les cailloux : Ce qu’il faut retenir, c’est l’importance de mettre ses GROS CAILLOUX en premier dans sa vie, sinon on risque de ne pas réussir... sa vie. En ligne ici
• Les deux cailloux, conte de Praline Gay-Para
  

• Le pari du Calife in « Le cercle des menteurs I » de Jean-Claude Carrière, éditions Plon, 1999, p 282 (réédité en format poche en 2008). Vous pourrez lire le texte dans son intégralité dans le billet D... comme doute

Sources des illustrations :

• Photo de dolmen : http://www.cathares.org/minerve-dolmen-photos1.html
• Petits galets : Rv, https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Cailloux.JPG, (paternité, reproduction à l'identique)
• Pile de cailloux : http://www.dane-et-le-crochet.fr/public/crochet/the_seriale_crocheteuses/serial_crocheteuse127_le_caillou/Cailloux_crochete.jpg
• Cordonnier : photo prise au Caire par Zelidja (http://nefermaat.egyptos.net/424-le-caire-cordonnier)
• Cailloux noirs et blancs : http://jardinjaponais.blogspot.fr/2007/04/phase-2-2-suite-galets-gris-et-galets.html
• Les photos de la balade sont de Françoise Ronzier

D'autres contes à découvrir :

• Le Petit Poucet sème des petits cailloux dans un conte de Perrault, à lire et à écouter ici
• Jean qui parlait aux pierres, La légende des murs de pierres Conte breton collecté par Jakez Hélias, en ligne ici : Il y a eu un temps où l'on n'aurait trouvé personne, sur toute la baie d'Audierne, pour élever un mur de galets autour d'un champ sans demander les conseils et le secours de celui qu'on appelait Jean des Pierres. Quand nous l'avons connu, c'était un vieil homme au visage torturé, le seul être vivant capable de comprendre les paroles qui sortent des galets de mer quand le vent y passe...
• Le casseur de pierres envieux in: "Contes des 5 continents" et en ligne ici. Le casseur de pierres envie le riche voisin, l'émir, le soleil, le nuage, le vent, la montagne qui est rongée par un casseur de pierres ... alors il retrouve sa condition première mais avec beaucoup plus de bonheur et de sagesse ...
• La soupe au cailloux, en plusieurs "recettes" dévoilée dans le billet "Soupe de contes". Elle est faite avec un caillou ou une pierre, mais peut aussi utiliser un clou, une hache ou même des boutons en os. Il existe de nombreuses variantes de cette histoire, en France, en Suède, en Russie, en Angleterre, en Belgique, dans d'autres pays encore, et une adaptation se passe en chine. http://lasoupeauxcailloux.ij-poitou-charentes.org/page.php?id=91&nosso=1
• La pierre de gratitude, dans le même esprit que les cailloux ramassés par le grand-père : Alors qu'il vivait des moments difficile, un homme ramasse un caillou en s'efforçant de penser à quelque chose de bon pour laquelle il est reconnaissant. Cela l'a aidé à traverser cette épreuve. Depuis, chaque matin, il prend le caillou et le met dans sa poche, et le dépose sur la commode le soir. Un jour, en présence d'un ami, il fait tomber son caillou et s'empresse de le ramasser. Son ami l'interroge : Pourquoi ce caillou a-t-il tant de valeur pour toi ? L’homme explique et son ami africain baptise le caillou "pierre de gratitude". Deux semaines plus tard, l'ami rentre chez lui en Afrique du Sud et envoie un courriel : Mon fils est atteint d'une maladie rare et il est mourant. Il a un type d'hépatite. Auriez-vous l'obligeance de m'envoyer trois pierres de gratitude ? Notre homme n'avait que des cailloux ordinaires trouvés au bord de la route. Mais il est allé au bord de la rivière, il a choisi de beaux cailloux, des cailloux qui seraient très spéciaux, et les a envoyés. Quatre ou cinq mois plus tard, il reçoit un autre courriel : Mon fils se porte mieux. Il va même très bien. Mais vous devez savoir quelque chose. Nous avons vendus plus d'un millier de cailloux à dix dollars pièce à titre de pierre de gratitude et les fonds ont été versés à des œuvres de bienfaisance. Merci beaucoup.'' d'après Lee Brower in : "Le secret" écrit par Rhonda Byrne (http://www.funfou.com/penserie/le-caillou.php)
• Le marteau rouge de George Sand : histoire d'un bloc de cornaline qui s'est usé petit à petit en traversant les siècles, jusqu'à devenir une simple pierre ... en ligne ici

Un peu d'Histoire : Les dolmens

• Vous apprendrez avec stupeur que plus de 1500 dolmens et 600 menhirs parsèment le Languedoc-Roussillon !!! Un dolmen est un ensemble de grandes pierres dressées supportant une dalle en forme de table. Le saviez-vous ? Autour du dolmen étaient généralement accumulées des pierres de plus petite dimension, de façon à former un monticule à base circulaire qui le recouvrait complètement. Il s'agit de sépultures qui ont servi chacune plusieurs fois, les dents et les ossements retrouvés révèlent une crémation souvent semi-partielle.(...) On y a trouvé des dents, des ossements éparpillés, des objets funéraires, des pollens de fleurs, des silex, des perles de diverses matières (coquillage, pierres dures, en cuivre parfois, malachite ou ambre), des épingles de bronze, des fragments de poteries… (...) Les deux dolmens de Minerve à quelques kms du village dominent la vallée et les plaines qui s'étendent sur le département de l'Aude. Ils sont face à un paysage empreint d'une grande sérénité, s'étalant à l'infini jusqu'aux contreforts des Pyrénées. Le premier est composé de 3 orthostates (dalles verticales d'une seule pièce) et d'une dalle de couverture. Il possède une allée bordée de chevêtres (dalles d'extrémité ou d'entrée). D'une taille moyenne très respectable, c'est un très joli spécimen de dolmen simple en relativement bon état de conservation. Le second, un peu plus haut sur le sentier, plus petit mais dans le même style ne possède pas d'allée. Les 13 autres dolmens constituent une ballade inoubliable, un merveilleux jeu de piste à travers la garrigue. (...) Patricia Milan http://www.prehistoirepassion.com/dolmens%20minerve.htm
• Deux brochures à consulter : Paul Ambert : "Dolmens en Minervois", Centre de recherche et de documentation du Minervois (CRDM), Olonzac, 2007, 24 p et "La grotte d'Aldène" Centre de recherche et de documentation du Minervois (CRDM), Olonzac, 2005
  

Balade nature :

• Ouvrage à consulter : ''Guide des oiseaux des régions méditerranéennes'' de Bruno Dubrac, Serge Nicolle, Hervé Michel, ed. Hypolaïs, 2005, 258 p

• Vous saurez tout sur le bec croisé en consultant oiseau.net et vous pourrez même l'entendre ici

• Quelques photos de plantes et d'insectes de la garrigue à découvrir sur http://www.entoflorachne.com/garrigue/Plantes_garrigue.html et http://www.entoflorachne.com/garrigue/Insectes.html

• La très grosse (et appétissante ?) chenille orange et brune (9 cm de long et 1,5 de large environ) était la chenille de Cossus cossus (le gâte bois) photo de Laurent CODARIN. Son papillon est ici en bas de page. Une si belle chenille pour un si modeste papillon ...

Cet article vous a donné envie de participer à la prochaine sortie ? Contactez Françoise Ronzier, Aphyllante Environnement, 04 68 91 11 16 et 06 71 71 12 76 <aphyllante.environnement@yahoo.fr>