Michel : Marguerite, le Diable et les sept nains d'après le conte merveilleux collecté par les frères Grimm Les sept corbeaux. Ce conte des Grimm est l'un des plus riches en éléments merveilleux : sept frères transformés en corbeaux à la naissance de leur sœur, une petite sœur qui va tout faire pour les retrouver et les délivrer, un soleil ogre et une lune ogresse, des étoiles qui tiennent le rôle des fées, un osselet en guise de serrure, une montagne de verre, un nain ... La famille et l'idée de solidarité de la fratrie sont au cœur du récit.
Résumé du conte de Grimm :

Un homme avait sept garçons. Naît enfin une fille pour leur plus grande joie, à tous deux. Mais l'enfant était si fluette et si faible qu'il fallut recourir au baptême d'urgence. Le père envoya, en toute hâte, l'un des garçons chercher de l'eau à la source. Les six autres y coururent avec lui, se disputèrent pour avoir la cruche, et ce qui devait arriver arriva : la cruche leur échappa et tomba au fond. Ils n'osaient pas rentrer. Ne les voyant pas revenir, le père, irrité et impatient, s'écria :
- ''Ils sont sûrement en train de s'amuser et ils en oublient la malheureuse petite ! Je voudrais les voir tous transformés en corbeaux !''
Sitôt ces paroles lâchées, il entendit au-dessus de sa tête, un froissement d'ailes dans l'air et vit sept corbeaux d'un noir brillant qui s'éloignaient à tire-d'aile.
Les parents ne pouvaient annuler la malédiction et se désolèrent de la perte de leurs sept garçons. Ils se consolèrent néanmoins, un tout petit peu, en voyant que leur petite fille non seulement avait échappé à la mort, mais prenait, chaque jour, de nouvelles forces et gagnait en beauté, de jour en jour.
Elle ignora, pendant des années, qu'elle avait eu des frères, car les parents lui avaient soigneusement caché la chose. Mais il advint un jour, tout à fait par hasard, qu'elle entendit des gens parler d'elle et dire qu'elle était bien jolie, et que c'était vraiment dommage qu'elle ait fait le malheur de ses sept frères. Bouleversée, elle courut interroger son père et sa mère pour savoir si elle avait eu des frères et apprendre ce qu'ils étaient devenus. Ne pouvant garder plus longtemps le secret, les parents lui assurèrent que c'était là la volonté du ciel et que ce n'était pas de sa faute à elle, si sa naissance avait occasionné le cruel événement.
Mais la fillette se sentait personnellement responsable et pensait que c'était son devoir de libérer ses frères de la malédiction. elle partit dans le vaste monde à la recherche de ses frères afin de les libérer à n'importe quel prix. Elle ne prit avec elle qu'une petite bague en souvenir de ses parents, une miche de pain contre la faim, une cruche d'eau contre la soif, et un petit tabouret contre la fatigue.
Elle marcha jusqu'au bout du monde. Quand elle s'approcha du soleil, comme sa chaleur était trop forte, comme il était trop effrayant et dévorait les petits enfants, elle s'éloigna bien vite et courut vers la lune. Mais elle était bien trop froide, sinistre et méchante, car, dès que la petite fille approcha, la lune dit : " Ca sent, ça sent l'odeur de chair humaine ! " Aussi l'enfant couru vers les étoiles qui se montrèrent amicales et bonnes : l'étoile du matin se leva pour lui donner un petit osselet :
- " Si tu n'as pas le petit osselet, lui dit-elle, tu ne pourras pas ouvrir la Montagne de Verre. Et, c'est dans la Montagne de Verre que sont tes frères. "
La petite serra l'osselet précieusement dans son mouchoir, le noua par-dessus et s'en allant, marchant sans cesse jusqu'à ce qu'elle fût arrivée à la Montagne de Verre. La porte était fermée. Mais, quand elle dénoua son mouchoir, il n'y avait plus rien dedans. Elle avait perdu le précieux cadeau des étoiles ! Que pouvait-elle faire à présent ? En bonne petite sœur qu'elle était, elle prit un couteau et se coupa le petit doigt de sa menotte, le poussa dans le trou de la serrure et réussit à ouvrir la porte.
Une fois qu'elle fut entrée, un petit nain vint à sa rencontre et lui demanda :
- Que cherches-tu, mon enfant ?
- Je cherche mes frères, les sept corbeaux.
- Messieurs les Corbeaux ne sont pas à la maison, dit le nain, mais si tu veux attendre jusqu'à ce qu'ils reviennent, tu n'as qu'à entrer.
Pendant qu'elle attendait, un petit nain servit le repas des corbeaux dans sept petites assiettes et sept petits gobelets. Alors, la petite sœur mangea un petit quelque chose dans chacune des sept petites assiettes et but une toute petite gorgée dans chacun des sept petits gobelets, et laissa tomber dans le septième gobelet la bague qu'elle avait emportée avec elle.
Tout à coup, on entendit dans l'air un grand bruit d'ailes et des croassements et quand ils furent là, ils voulurent manger et boire, cherchant chacun son assiette et son gobelet. Mais, l'un après l'autre, ils dirent :
- Qui a mangé dans ma petite assiette ? Et qui a bu dans mon petit gobelet ? Il y a des lèvres humaines par ici !
Et comme le septième finissait son gobelet, la petite bague tomba devant lui. Il regarda ce que c'était et reconnut en elle une bague de ses parents, sur quoi il s'exclama :
- Plût à Dieu que notre petite sœur fût là, nous serions délivrés !
corbeaux_7_Henriette Sauvant_editions Nord-Sud_1995En entendant ce souhait, derrière la porte où elle se tenait cachée, la fillette sortit et s'avança vers ses frères, qui retrouvèrent instantanément leur forme humaine et vinrent l'embrasser et la serrer sur leur cœur. Puis ils rentrèrent tous ensemble joyeusement à la maison.

Sources :

Illustration d'Henriette Sauvant pour Les Sept corbeaux par Grimm. éditions Nord-Sud, 1995. Pixelcreation.fr

Viviane : ColombetteLes_plus-belles-legendes-de-France_France-Loisirs_2011, légende provençale extraite des Les plus belles légendes de France, France Loisirs, 2011, (textes de Franck Rouve et illustrations de Sandrine Bonini). Soixante-huit contes issus du folklore de dix-sept régions, illustrés par des aquarelles originales, sont réunis dans cet ouvrage et nous invitent à un enchantement sans cesse renouvelé.
Résumé de Viviane :

Une pauvre femme, Colombette, vivait avec son mari Jean-le-Grognon, si bien nommé ...
Un jour que Colombette mendiait de maison en maison, elle voit tout à coup briller par terre un grain, un tout petit grain, un grain de blé. Elle décide de le planter devant sa maison et tous les jours l'arrose de ses pleurs ... le grain de blé se met à pousser, pousser. Son mari lui suggère de grimper, ce qu'elle fait.
Arrivée tout là-haut, elle voit Dieu et lui demande humblement :
- Mon mari trouve le pain dur. Pourrions-nous avoir du pain blanc tous les jours ?
Dieu le lui accorde.Et tous les jours ils mangent du pain tendre.
Quelques temps plus tard, Jean-le-Grognon demande à Colombette de remonter voir Dieu.
- Pourrions-nous avoir un peu de chair le Dimanche ?
Dieu lui accorde cela également et ils ont de la viande pour manger à leur faim.
Une troisième fois, Colombette dû obéir à son grognon de mari pour demander des perdreaux et un peu plus de nourriture, mais elle le fait avec beaucoup de réticence.
Mais un peu plus tard, de nouveau, son mari lui dit de remonter pour demander que la cabane devienne un palais avec tout ce qu'il faut dedans et dehors. Mais là, le Bon Dieu répond :
- Colombette dit à ton mari qu'il me fatigue avec ses demandes.
Colombette redescend le cœur gros et, connaissant le caractère de son mari, avec beaucoup de crainte... Son mari, furieux du refus de Dieu, se met en colère, blasphème, se met à jurer et son venin emplit sa gorge de telle manière qu'il étouffât !
Le beau blé en herbe se dessécha alors et ne fut plus que fétu de paille. Mais Colombette décida d'y monter encore une fois, Elle n'avait plus besoin d'échelle car deux ailes blanches poussèrent dans son dos et s'élevant toujours plus haut, elle n'est jamais redescendue.
Une grand-mère raconte le miracle de Colombette car elle a vu la cabane de Jean-le-Grognon à l'abandon, où parfois, quand le vent souffle, l'on entend alors le grognement d'un porc errant à travers les ruines ...

Sources :
Ce conte est issu d'un ouvrage plus ancien Le monde des histoires pittoresques : fleurs choisies du Pélerin aux bureaux du Pélerin (Paris). 1891 mis en ligne sur Gallica (cliquez ici) à partir de la page 151 du recueil.

Patricia : Les canards d'argent du Troll Les_aventures_Askeladd_DESBUREAUXin : Desbureaux Martine : Les aventures d'Askeladd, le petit futé dompteur de trolls, Contes norvégiens extraits des collectes de Jorgen Moe, Peter Chrisen Asbjornsen et d’autres folkloristes, Flies France, 2011. Ce conte norvégien est plein de rebondissements:

  • Il rappelle par certains côté Cendrillon mais ici c'est un jeune garçon qui est appelé Cendre-Piedpar ses frères, et ce sont ces deux frères aînés qui le jalousent,
  • Le petit Poucet parce qu'il réussit à berner le Troll, très bête et un peu ogre à ses heures quand on l'a contrarié,
  • Hansel et Gretel quand Askeladd se fait engraisser,
  • et , bien entendu, cela finira par un beau mariage avec la fille du roi !

Résumé de Patricia :
Askeladd, méprisé de ses frères qui le jugent tout juste bon à attiser le feu, est rejeté par eux. Il part seul, avec un vieux pétrin sous le bras, objet dédaigné par les deux frères bien que ce soit le seul héritage du père. Askeladd entre au service du Roi. Ses frères jaloux de sa réussite prétendent qu'il s'est vanté de voler le Troll. Prenant son pétrin comme barque, Askeladd va réussir à tromper le Troll à 3 reprises il lui dérobe ses 7 canards d'argent, son couvre-lit à carreaux d'or et d'argent, et sa harpe d'or qui chasse la tristesse. Prisonnier, il est engraissé (3 fois 7 jours) mais grâce à sa ruse, c'est la fille du Troll qui finira à la casserole ... Askeladd gardera de l'or et de l'argent pour lui, le roi le récompensera en lui donnant sa fille en mariage et il recevra la moitié du royaume. Askeladd_7canards_http://trauskeneventyr.blogspot.fr/2010/01/askeladden-som-stjal-slvendene-til.htmlPour finir, il pardonne à ses deux frères envieux qui l'ont mis dans le pétrin (dans tous les sens du terme) car, finalement, c'est grâce à eux qu'il a pu obtenir tout cela ...

Sources :

  • Desbureaux Martine : Les aventures d'Askeladd, le petit futé dompteur de trolls, Contes norvégiens extraits des collectes de Jorgen Moe, Peter Chrisen Asbjornsen et d’autres folkloristes, Flies France, 2011
  • Jorgen Moe, Peter Chrisen Asbjornsen, Contes de Norvège, Editeur Esprit ouvert, 1999

Pour en savoir plus :

  • Askelad signifie Cendre-Pied : en permanence assis dans l'âtre, il a les chaussons (labb) pleins de cendre (aske). Mais dans la tradition populaire, il s'appelait en réalité Askefis ou Oskefis, littéralement Souffle-Cendres. Seulement voilà, le verbe fise signifie aussi péter ! Jorgen Moe et Peter Chrisen Asbjornsen qui ont collecté et publié en 1844-1844 un recueil de Contes norvégiens ont donc modifié son nom et il est resté !
  • Pour lire ce conte en entier, sautez directement, sans vous mouiller, au billet précédent : ''Asleladd et les canards d'argent du Troll''


Abessia : La vieille dans la forêt - conte de Grimm en ligne ici
Résumé :
Une pauvre petite servante voyageait à travers une grande forêt avec ses maîtres mais leur voiture est attaquée par des bandits : seule la jeune servante a survécu, cachée derrière un arbre. Elle se désespère quand arrive vers elle une blanche colombe tenant une petite clef d'or dans son bec. La colombe lui indique un arbre à ouvrir avec cette petite clef, pour y trouver de la nourriture, puis un autre arbre pour le lit et un troisième pour de beaux vêtements. Prince-Arbre_http://expositions.bnf.fr/contes/grand/273.htmEn échange, la colombe conduit la jeune fille à une petite maison : « Tu entreras et il y aura là, devant la cheminée, une vieille femme qui te dira bonjour; mais tu ne dois à aucun prix lui répondre un seul mot. Pas un mot, quoi qu'elle dise ou fasse; et tu iras sur ta droite où tu verras une porte, que tu ouvriras pour entrer dans une petite chambre, où il y a un tas de bijoux parmi lesquels tu chercheras un anneau ordinaire ». La vieille sort de la cabane avec un oiseau en cage. La jeune fille que l’oiseau a l'anneau dans son bec, elle le prend. Elle délivre ainsi d'un mauvais sort un beau prince changé en arbre ainsi que ses chevaux. Ils chevauchèrent jusqu'à son royaume, se marièrent et vécurent heureux.

Illustration : http://expositions.bnf.fr/contes/grand/273.htm

Michèle : La chair de la langueContes_Curieux_des_4_coins_du_monde_Gay-Para conte oriental plein d'humour et de sagesse trouvé dans le recueil de Praline Gay-Para, Contes curieux des quatre coins du monde, Actes Sud , Babel, 2007.
Résumé :
Le jardinier a une femme épanouie (dans tous les sens du terme) et gaie. Le sultan a une épouse triste qui se meurt d'ennui. Ils font échange. La femme du jardinier révèle le secret : son mari la nourrit de la chair de la langue. Le sultan convoque son cuisinier : il prépare un repas spécial de langues mais cela dégoûte au plus haut point sa nouvelle épouse. Ils refont échange : l'épouse du jardinier est tout à fait soulagée de retrouver son mari et celle du sultan maintenant épanouie et heureuse ne veut pas retourner au palais ! Voilà le secret : le jardinier sait parler aux femmes ! Il les nourrit ainsi de la chair de la langue en leur racontant sa journée, de jolies choses, en leur faisant des compliments ou leur offrant des poèmes...
Le texte est en ligne sur le blog de Philippe Didion : cliquez ici