Je veille, tu veilles, il (elle) veille... de la veille documentaire à la veillée de contes ... - Tag - exilLa veille documentaire n'est pas réservée aux insomniaques ! Il s'agit pour les documentalistes travaillant dans un Centre de Ressources de saisir et partager les nouvelles informations pratiques. Et pour éclairer la réflexion : quelques contes.2024-03-28T20:02:07+01:00Patricia GUSTINurn:md5:6861832ae2b6079117e23df141847c1bDotclearCAFE PHILO : Parcours de migrantes - Gruissan - 21 janvier 2022 -urn:md5:278858ae82ee9c068463d3366e3adc652022-01-24T10:53:00+00:00patricia gustinCAFE-PHILO et Pop-PhilosophieaccueilCAFE-PHILOconte de sagesseconte merveilleuxexilGrimm<h4><strong>Migrantes</strong><br /></h4>
<p><img src="http://infodoc.blog.free.fr/public/032_cafe.gif" alt="032_cafe.gif" style="float:left; margin: 0 1em 1em 0;" title="032_cafe.gif, fév. 2009" /> A l’initiative du Collectif Accueil Migrants de Narbonne, nous vous proposons d’échanger avec trois femmes qui témoigneront de leurs parcours migratoires et de leurs conditions de femmes.<br />
<br /></p>
<p><img src="http://infodoc.blog.free.fr/public/CONTES/blanche-neige-foret-Quentin_Grebanx200.jpg" alt="Blanche-Neige_Forêt_illustration de Quentin Greban" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Blanche-Neige_Forêt_illustration de Quentin Greban, janv. 2022" /><br />
<strong>Dans cet article vous découvrirez :</strong><br /></p>
<ul>
<li><ins>Ce que nous disent les contes</ins> : <strong>Blanche-Neige, une réfugiée ?</strong> <br /></li>
<li><ins>Quelques réflexions :</ins> à défaut des témoignages.</li>
<li><ins>En conclusion, un petit conte de sagesse :</ins> <strong> Le jour se lève</strong>. Ce conte nous montre comment faire jaillir la lumière sur le monde : en accueillant l'étranger comme un frère ... <br /></li>
<li><ins> Autres contes, autres pistes ...</ins><br /></li>
</ul>
<p><br /><br />
<em>article modifié et augmenté (bas de page) le 27 janvier 2022.</em><br /></p> <h2>Que nous disent les contes ? - - - - - - - - - - - - - - - -</h2>
<p>Les contes nous parlent de la condition humaine, de toutes les conditions de la naissance à la mort. Des princes exilés, il y en a. Des princesses aussi ... J'ai trouvé quelques similitudes intéressantes entre le conte de Blanche-Neige et les difficultés rencontrées par les migrantes en particulier.<br /></p>
<h4><strong>Blanche-Neige, une réfugiée ?</strong></h4>
<p>Ce conte rapporté par les frères Grimm semble mettre en lumière le parcours si difficile des migrants. Ci-dessous le résumé du conte étape par étape, en indiquant à chaque fois les similitudes que j'ai pu faire avec les épreuves endurées par les migrants et les migrantes.<br /></p>
<p>1/ <strong>Les conditions de vie se détériorent :</strong><br /></p>
<blockquote><p><img src="http://infodoc.blog.free.fr/public/CONTES/.Blanche-neige-portrait2_s.jpg" alt="Blanche-Neige_Walt_Dysney_1937" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Blanche-Neige_Walt_Dysney_1937, déc. 2011" />Blanche-Neige, fille de roi, est <ins>une toute jeune fille naïve</ins>, apparemment sans soucis matériel mais, orpheline de mère, <ins>elle doit subir la jalousie</ins> de sa belle-mère qui veut rester à tout jamais la plus belle du royaume.<br /></p></blockquote>
<p>Les conditions de départ dégénèrent au point de mettre en péril son existence : bonnes au départ, elles deviennent à peine acceptables : jalousie et haine font craindre pour sa vie.<br />
<br /></p>
<p>2/ <strong>Fuir pour vivre : </strong><br /></p>
<blockquote><p><img src="http://infodoc.blog.free.fr/public/CONTES/Blanche-Neige_chasseur_Charles_Santorex200.jpeg" alt="Blanche-Neige_Chasseur-ill. de Charles Santore" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Blanche-Neige_Chasseur-ill. de Charles Santore, janv. 2022" />La jalousie allume un feu intérieur dans le cœur de la mauvaise reine : son ressentiment la conduit à <ins>la haine</ins>. Elle veut se débarrasser à tout jamais de sa rivale. Elle demande à un soldat de perdre Blanche-Neige en forêt et de lui ramener ses poumons et son foie. Le soldat a pitié de la jeune fille et au lieu de la tuer l’abandonne en forêt il pense qu’elle sera bientôt dévorée par les bêtes sauvages. Pour obéir aux ordres de la reine il ramènera un foie et des poumons d’un jeune sanglier (organes vitaux)<br /></p></blockquote>
<p>Parfois, il faut fuir pour sauver sa vie, physique ou morale, sa liberté de vivre. Les organes vitaux réclamés par la Reine comme preuve de sa mort sont <ins>les poumons</ins> (symbole de l'oppression absolue ; prélever les poumons c'est ôter la vie en empêchant de respirer, en étouffant l'individu, en le privant de liberté) et <ins>le foie</ins> (symbole de tout ce qu'on assimile, croyances, lois, propagande, le foie représente notre capacité d'adaptation face aux événements de la vie : soit on accepte tout sans dire mot, et c'est la fin de l'individu pensant, soit le rejet du "gavage" conduit à la révolte). Les personnes qui ont "besoin de respirer", qui ont besoin de liberté, et celles qui ne "digèrent pas " les didacts politiques sont à éliminer. Il reste la fuite pour échapper à une mort lente par "asphyxie" ou une mort violente. Des passeurs guident ceux qui partent mais souvent les égarent dans les lieux où il leur est difficile de survivre. Ils leur laissent tout juste la vie et les abandonnent à eux-mêmes sans se soucier de leur devenir, de leur survie. Les migrants se sentent perdus dans un vaste monde inconnu et peu accueillant.<br />
<br /></p>
<p>3/ <strong>Réfugié clandestin :</strong><br /></p>
<blockquote><p><img src="http://infodoc.blog.free.fr/public/CONTES/Blanche-Neige_7_nains_x200.jpeg" alt="Blanche-Neige_7 nains" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Blanche-Neige_7 nains, janv. 2022" />Perdue dans la forêt, Blanche-Neige erre, effrayée, mais trouve refuge dans une maison forestière où vivent sept nains. Elle va rester avec eux, ne sachant où aller. Elle est loin du confort du palais, au contraire d’être servie c’est elle qui veillera à leur confort <ins>en travaillant dur de ses mains ; elle ne doit surtout pas sortir et se montrer</ins> mais rester cachée aux yeux de la reine. Blanche-Neige grandit et devient une belle jeune-fille.<br /></p></blockquote>
<p>Se sentir perdue dans un monde inconnu est difficile à vivre. Le refuge tant espéré est souvent loin de ce qu’on espérait. Travail clandestin, exploitation, il faut payer très cher le prix du passage et rester caché pour sa sécurité. Accepter des conditions qu'on n'aurait jamais accepté auparavant ...<br />
<br /></p>
<p>4/ <strong>Rejet des migrants :</strong><br /></p>
<blockquote><p><img src="http://infodoc.blog.free.fr/public/CONTES/Blanche-Neige_lacets__Nardini_x150.jpeg" alt="Blanche-Neige_lacets_tentative 1" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Blanche-Neige_lacets_tentative 1, janv. 2022" /> Mais la Reine apprend par son <ins>miroir magique</ins> que Blanche-Neige est toujours vivante). Elle tente alors par trois fois de faire mourir la princesse. <br />
<br />
<ins>La Reine, un peu sorcière, se métamorphose en vieille femme pour attendrir Blanche-Neige</ins> : elle lui offre des <ins>lacets</ins> pour son corset et tente de l’étouffer en serrant son corset au point de lui couper la respiration, mais les nains vont couper le lacet. <br />
<img src="http://infodoc.blog.free.fr/public/CONTES/Blanche-Neige_peigne_Meyerheim_x150.jpeg" alt="Blanche-Neige_Peigne empoisonné_tentative 2_ill. de Meyerheim" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Blanche-Neige_Peigne empoisonné_tentative 2_ill. de Meyerheim, janv. 2022" /><br />
<br />
La reine n'abandonne pas, elle va faire une seconde tentative : elle se métamorphose en vieille marchande et propose à Blanche-Neige <ins>un peigne empoisonné</ins>. Elle peigne la jeune fille qui perd connaissance. Les nains vont retirer le peigne de sa chevelure. <br />
<br />
<br />
Pour en finir, la troisième fois la Reine se change en vieille paysanne. <img src="http://infodoc.blog.free.fr/public/CONTES/Blanche-Neige_pomme_Claire_Degans_x150.jpeg" alt="Blanche-Neige_pomme empoisonnée_tentative 3_ill Claire Degans" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Blanche-Neige_pomme empoisonnée_tentative 3_ill Claire Degans, janv. 2022" />Elle va offrir à Blanche-Neige <ins>une pomme empoisonnée</ins> :<br />
Pour mettre en confiance sa victime, la vieille, maline, croque la partie blanche inoffensive et offre la partie empoisonnée à Blanche-Neige, qui tombe comme morte.<br />
<br /></p></blockquote>
<p>La plupart des pays cherchent à se débarrasser des migrants, au minimum à empêcher ou rendre difficile leur arrivée.</p>
<ul>
<li>L'accueil officiel propose un visa provisoire, des papiers à valider, cadeau empoisonné qui fait espérer mais le parcours administratif est difficile, cela empoisonne leur vie, les paralyse parfois. Cette période peut être vue comme un moment d'initiation, où le migrant doit se mesurer aux dangers de l'existence. <br /></li>
<li>"Croquer la pomme" signifiant devenir femme en ayant des relations sexuelles, peut-on y voir aussi ce qui menace les femmes livrées à elle-même en pays étranger ?<br /></li>
<li>Certains migrants sont arrêtés, non pas grâce à un miroir magique mais en recoupant les informations grâce à l'écran d'internet ; par le biais des services de l'immigration ou des contrôles d'identité, ils sont renvoyés dans leur pays d’origine au risque de leur vie, sans aucune compassion de la part des services d’extradition. Les services sociaux à qui les migrants ont fait confiance comme Blanche-Neige à la vieille femme, disent les aider mais ne peuvent pas souvent intervenir efficacement. <br /></li>
</ul>
<p><br /></p>
<p>5/ <strong>Une mort apparente, une mort sociale transitoire :</strong><br /></p>
<blockquote><p><img src="http://infodoc.blog.free.fr/public/CONTES/Blanche-Neige_cercueil_de_verre_Dreoilin_x200.jpeg" alt="Blanche-Neige_Cercueil_nains_ill. de Dreoilin" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Blanche-Neige_Cercueil_nains_ill. de Dreoilin, janv. 2022" />Blanche-Neige croque la pomme et tombe évanouie. <br />
La vieille la croit morte.<br />
Les nains ne peuvent se résoudre à l’enterrer, elle semble simplement endormie : ils conservent son corps dans <ins>un cercueil de verre</ins>. Mais Blanche-Neige n’est pas morte, le morceau de pomme s’est coincé dans sa gorge, elle ne l’a pas avalé et ne s’est donc pas empoisonnée mais elle est dans un coma qui lui donne l'apparence de la mort.<br /></p></blockquote>
<p>Un long temps d’attente, d’angoisse, arrive souvent avant qu’il soit possible de s’intégrer socialement dans le pays d’accueil. C’est comme être en dormance, en attente. Un état de mort sociale en attendant mieux. Mais la vie continue, l’espoir reste malgré tout.<br />
<br /></p>
<p>6/ <strong>De l'aide enfin ! </strong><br /></p>
<blockquote><p><ins>Un prince</ins> qui chevauche par là tombe amoureux de la belle endormie. <img src="http://infodoc.blog.free.fr/public/CONTES/Blanche-Neige_cercueil__Franz_Juttner_x200.jpeg" alt="Blanche-Neige_Cercueil_ill. de Franz Jüttner" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Blanche-Neige_Cercueil_ill. de Franz Jüttner, janv. 2022" />Il obtient des sept nains la permission d'emporter le cercueil. Mais en route <ins>un porteur trébuche</ins> sur une grosse racine, délogeant le morceau de pomme coincé dans la gorge de Blanche-Neige : elle ouvre les yeux, tousse, crache la pomme et se réveille. Le prince lui demande sa main, et Blanche-Neige accepte. <br /></p></blockquote>
<p>Même les situations les plus difficiles finissent par se résoudre. Pas forcément par un prince charmant … ce peut-être une association d’aide, des bénévoles, des avocats. Une fois « le morceau craché », toutes les difficultés dites et reconnues, la vie peut reprendre, bien plus riche et belle. Peut-être qu'un mariage permettra d'acquérir la nationalité du pays d'accueil ... Espérons que ce n'est pas dans ce cas là uniquement une histoire de papiers... <br />
<br /></p>
<p>7/ <strong>Justice - réparation :</strong><br /></p>
<blockquote><p><img src="http://infodoc.blog.free.fr/public/CONTES/semelles_lave_rouge_x200.jpeg" alt="Blanche-Neige_souliers fer rouge-https://www.maxicours.com/se/cours/loi-de-wien-couleur-des-corps-chauffes/" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Blanche-Neige_souliers fer rouge-https://www.maxicours.com/se/cours/loi-de-wien-couleur-des-corps-chauffes/, janv. 2022" />Invitée au mariage, la méchante reine découvre que la princesse est très belle, bien plus qu’elle ; elle reconnaît avec terreur Blanche-Neige. La reine est alors condamnée à danser avec des <ins>souliers de fer chauffés au rouge</ins>, jusqu'à ce que mort s'ensuive. <br /></p></blockquote>
<p>Tôt ou tard, justice sera rendue … pas forcément par soi-même ou les institutions en place. La vie s’en chargera. Les fauteurs de mauvais traitements marcheront « sur des charbons ardents ». Malgré toutes les épreuves, les réfugiés conservent leurs qualités intrinsèques qui font d'eux des personnes à part entière, dignes de respect. Apprécions-les à leur juste valeur !<br />
<br /></p>
<p><ins>Fin alternative des frères Grimm :</ins><br /></p>
<blockquote><p><img src="http://infodoc.blog.free.fr/public/CONTES/Miroir-Reine-Blanche-neige-Dysney-200.jpeg" alt="Miroir-Reine-Blanche-Neige-Dysney" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Miroir-Reine-Blanche-Neige-Dysney, avr. 2021" />La méchante reine, belle-mère de Blanche-Neige, avait également été invitée au mariage. Après avoir revêtu ses plus beaux atours, elle prit place devant le miroir et demanda :<br />
<em>Miroir, miroir joli,</em> <br />
<em>Qui est la plus belle au pays</em> ?<br />
Le miroir répondit :<br />
<em>Madame la reine, vous êtes la plus belle ici, mais la jeune souveraine est mille fois plus belle.</em><br />
La méchante femme proféra un affreux juron et elle eut si peur, si peur qu'elle en perdit la tête.<br /></p></blockquote>
<p><br /></p>
<p><ins>Sources :</ins> <br /></p>
<ul>
<li><em>Blanche-Neige</em>, conte recueilli par Jacob et Wilhelm Grimm. Dans la première version de 1812, la reine est la mère naturelle. Blanche-Neige se réveille lorsqu'un valet du prince lui donne un coup dans le dos car il était énervé d’avoir eu à la porter toute la journée. Il y a quelques variantes sur des éléments mineurs, mais la trame reste la même.</li>
<li>Texte intégral à lire en ligne : <a href="https://www.grimmstories.com/fr/grimm_contes/blanche-neige">https://www.grimmstories.com/fr/grimm_contes/blanche-neige</a><br /></li>
</ul>
<p><br /></p>
<p><ins>Illustrations :</ins><br /></p>
<ul>
<li>Portrait de Blanche-Neige, Walt_Dysney, 1937</li>
<li>Blanche-Neige et le chasseur, illustration de Charles Santore</li>
<li>Blanche-Neige et les sept nains</li>
<li>Blanche-Neige étouffée par les lacets de la Reine déguisée en marchande, illustration de Nardini</li>
<li>Blanche-Neige peignée avec le peigne empoisonnée, illustration de Meyerheim</li>
<li>Blanche-Neige et la pomme empoisonnée, illustration de Claire Degans</li>
<li>Blanche-Neige dans son cercueil de cristal, et les nains, illustration de Dreoilin</li>
<li>Blanche-Neige dans son cercueil de cristal, le prince et les porteurs, illustration Franz Jüttner</li>
<li>Blanche-Neige : les souliers de fer chauffés au rouge, lave en fusion, https://www.maxicours.com/se/cours/loi-de-wien-couleur-des-corps-chauffes/</li>
<li>Le miroir magique de la reine, Dysney, 1937<br /></li>
</ul>
<p><br /></p>
<h4>Interprétations du conte :<br /></h4>
<p>Comme bien des contes populaires, Blanche-Neige est ouvert à de multiples interprétations : <br /></p>
<ul>
<li>J'ai vu dans ce conte bien des <ins>similitudes avec les étapes et les épreuves vécues par les migrants</ins> qui quittent leur pays pour vivre.<br /></li>
</ul>
<p><br /></p>
<ul>
<li><ins>Blanche-Neige est un conte d’avertissement</ins>. Tout passe ici-bas : beauté, jeunesse, bon départ dans la vie. Il faut se méfier des personnes offrant des choses tentantes : quand c’est trop beau pour être vraies. La naïveté ne permet pas de voir les mauvaises intentions et expose au danger. Mais le courage, la patience et l'humilité sont récompensées, alors que la vanité peut mener à la chute, tôt ou tard.<br /></li>
</ul>
<p><br /></p>
<ul>
<li>Erik Pigani, psychothérapeute, explique que le conte décrit <ins>les étapes de la puberté chez la jeune fille</ins>. Selon Pigani, une notion morale s'ajoute avec le fait que la mère, même si elle souhaite garder sa beauté et sa jeunesse, doit laisser la place à sa fille.<br /></li>
</ul>
<p><br /></p>
<ul>
<li>Le conte a été étudié par plusieurs psychanalystes, notamment <ins>Bruno Bettelheim</ins> et Marie-Louise von Franz. <em>Le conte commence par une situation œdipienne mettant en conflit la mère et la fille. La marâtre est restée à un stade narcissique qui la rend vulnérable et que le conte invite à dépasser. La jalousie de la belle-mère est à la fois la peinture du comportement de certains parents qui se sentent menacés au moment de l'adolescence de leurs enfants, mais également une projection sur une figure haïe des propres sentiments de jalousie de l'enfant. Blanche-Neige se retrouve chassée du château, errant dans la forêt, lieu de terreur et de confusion comme le début de la puberté. Recueillie par les sept nains, personnages à la fois masculins mais peu menaçants sexuellement, elle peut se développer dans un milieu sûr, mais non sans être exposée à la tentation narcissique (les colifichets offerts par la méchante reine). Cette période peut être vue comme un moment d'initiation, où l'adolescent doit se mesurer aux dangers de l'existence. La dernière tentation, celle de la pomme, représente pour Bruno Bettelheim le moment où l'adolescent accepte d'entrer dans une sexualité adulte, c’est-à-dire le moment où il devient pubère. Suit une période de latence (le coma) qui lui permet d'<ins>attendre en toute sécurité que sa maturité psychique jointe à sa nouvelle maturité physique lui donnent enfin accès à une sexualité adulte</ins>.</em> (Wikipedia)<br /></li>
</ul>
<p><br /></p>
<h2>Quelques réflexions partagées - - - - - - - - - - - - - - -<br /></h2>
<p>Chaque jour, des personnes sont obligées partir de chez elles, souvent brutalement. Les raisons sont multiples : fuir un conflit, échapper à des persécutions ou partir avec l'espoir d'un meilleur avenir, ailleurs. Elles partent de Syrie, d'Afghanistan, du Myanmar, d'Erythrée, de Somalie, d'Irak, ou encore du Honduras, d'El Salvador ou du Guatemala... Ceux qui ont les moyens de protéger et d'accueillir de l'Europe à l'Australie, en passant par la Thaïlande ou la Malaisie, se ferment, en laissant mourir à leur portes des milliers de personnes. Il est urgent que ces droits soient pleinement respectés et appliqués. Les droits humains n'ont pas de frontières. <a href="https://www.amnesty.fr/refugies-et-migrants">(Amnesty International</a>)<br />
<br /></p>
<h4>Témoignages :<br /></h4>
<p><a href="https://france3-regions.francetvinfo.fr/nouvelle-aquitaine/gironde/bordeaux/laissez-moi-recuperer-mes-reves-l-association-bordelaise-mana-aide-des-migrantes-a-se-reconstruire-2384167.html">Témoignage France3 Régions</a>, le 18/12/2021 : <ins>Des associations</ins> aident des migrantes à se reconstruire.</p>
<ul>
<li>Gift (partie du Nigéria) obtient sa demande d’asile pour traite humaine et bénéficie d’un titre de séjour. (...) <q><em>J'ai encore de l'espoir parce que je n'ai jamais abandonné depuis le premier jour. Même si aujourd'hui je n'ai plus rien. Ni logement, ni papier ni rien</em></q> confie-t-elle. Combative, elle refuse de baisser les bras, de renoncer à ses rêves. <q><em>En France, si tu n'as pas de papier. Tu n'as aucun droit... C'est difficile pour moi. Je veux juste que la France me donne une seconde chance. Donnez-moi le titre de séjour à nouveau pour que je récupère mes rêves. Je suis fatiguée d'aller d'un endroit à l'autre...</em></q> . <q><em>L'association MANA m’a aidé à me relever, à comprendre qui j’étais. Ils m’ont donné les clés pour m’intégrer, m’ont permis de découvrir la culture et la langue française. Les rencontres avec les autres femmes accompagnées par MANA m’ont aidé à accepter mon histoire</em></q>. Elle espère obtenir le <ins>droit d'asile pour traite humaine</ins>. Son projet ? Elle voudrait prendre soin de seniors ou d'enfants. Elle demande juste une vie normale… <br /></li>
</ul>
<p><br /></p>
<ul>
<li>Témoignage de Yancouba Badji, parti du Sénégal parce que les conditions de vie n’y étaient « plus favorables » - <a href="https://www.20minutes.fr/monde/3224495-20220127-migrants-rescape-senegalais-raconte-terrifiant-periple-jusqu-europe">Interview</a> publié le 27/01/22 : <q><em>Traverser la Méditerranée, ce cimetière silencieux, était une expérience terrifiante.</em></q> <q><em>On a fait de moi un véritable esclave et là-bas, j’ai vu des jeunes filles se prostituer pour un morceau de pain et des gens mourir de faim sur la plage.</em></q><br /></li>
</ul>
<p><br />
<a href="https://www.infomigrants.net/fr/post/32679/une-vie-derrance-en-europe-temoignages-de-migrants-du-jardin-villemin">Une vie d'errance en Europe, témoignages de migrants</a> : Tous se disent épuisés par des années passées à la rue, ballottés entre différents pays de l'Union européenne, sans arriver à obtenir une protection et ainsi pouvoir se reconstruire. <br />
<br /></p>
<ul>
<li><em>Cela fait plus de six ans que j'ai quitté l' Afghanistan mais je n'ai toujours pas réussi à obtenir un titre de séjour en Europe. C'est dur de se dire qu'on a passé toutes ces années dans la rue. Je vois bien que ma situation empire de jour en jour. Si je n'arrive pas à avoir des papiers et à trouver un logement, je vais devoir rentrer dans mon pays. Je crois que finalement je préfère mourir en Afghanistan plutôt que de continuer à vivre de cette façon. <ins>Ma vie est un enfer.</ins></em><br /></li>
</ul>
<p><br /></p>
<ul>
<li><em>Cela fait maintenant plus de 15 ans que je vis dans les rues européennes. (...) Les associations font un travail formidable, je les remercie pour ça mais ça ne suffit pas. Je suis effaré de la manière dont l'Union européenne nous considère et nous traite. <ins>Tout ceci n'est pas géré de façon humanitaire</ins>.</em><br /></li>
</ul>
<p><br /></p>
<ul>
<li><em>La rue change les gens, on devient une nouvelle personne, pas forcément meilleure. (...) Depuis mon arrivée en France, j'ai rencontré beaucoup de bonnes personnes qui ont exprimé de la compassion envers moi. La plupart me disent que la question migratoire en France, et au sein de l'Union européenne, est une question politique. C'est la réalité, mais <ins>pourquoi devrions-nous payer pour un problème qui nous dépasse ?</ins></em><br /></li>
</ul>
<p><br /></p>
<ul>
<li><em><ins>Je ne m'attendais pas à être traité de cette façon</ins>, cela n'a rien à voir avec ce qu'on nous disait de la France quand nous étions enfant. Ma demande d'asile a été rejetée et je ne peux pas retourner au Yémen. Que dois-je faire ?<ins> J'ai l'impression d'avoir perdu le contrôle de ma vie.</ins> Je ne pense pas que je pourrais un jour avoir une vie normale.</em><br /></li>
</ul>
<p><br /></p>
<p><a href="https://www.francetvinfo.fr/societe/recits-de-migrants-l-enfer-en-mer-mediterranee_1699163.html">Reportage de Mathilde Lemaire : L'enfer en Méditerranée</a> Depuis le début de l'année 2021, le nombre de migrants morts ou disparus en Méditerranée approche les trois mille.</p>
<ul>
<li>Abderrahmane, 25 ans a fui le Soudan, à cause des violences. Son exode débute par <em>cinq mois de marche dans le désert avec trois copains de son village. Arrivés à Zuwara sur la côte libyenne, ils découvrent des conditions de vie plus dangereuses encore qu'au Soudan. C'est là qu'Abderrahmane et ses amis rencontrent ceux qui leur promettent une traversée vers l'Europe.</em> <br /></li>
<li><q><em>Quand on est entrés dans l'eau, on a distingué le bateau dans l'obscurité. On nous avait promis un chalutier, mais c'était un pneumatique de 12 mètres sur 2 ! On est quand même montés à bord. Nous étions 95, serrés comme vous n'imaginez pas. Les passeurs, eux, étaient installés à l'aise sur un autre bateau, devant. Ils nous ont juste distribué une bouteille d'eau par personne, parce que soit disant le voyage ne prendrait que 13 heures. Il a duré trois jours !</em></q>Le temps que la marine italienne intervienne, 37 passagers (sur 95) sont morts noyés.<br /></li>
</ul>
<p><br /></p>
<ul>
<li><ins>La pression migratoire sur les frontières polonaises, mais aussi lituaniennes, ne cesse de croître.</ins> Depuis plus de six mois, des milliers de migrants essaient de traverser la frontière entre le Bélarus et la Pologne. Des milliers de familles, coincées à la frontière, errent dans des forêts glaciales, sans aide ni nourriture. Certains polonais s'en sont émus et ont accueilli un demandeur d'asile originaire d'Afghanistan : <em>Selon une ancienne tradition polonaise, pour le repas de Noël, il faut toujours laisser une assiette vide à table. C'est pour un invité inattendu et dans le besoin qui pourrait frapper à la porte ce jour-là.</em> Mais les pays de l'Est de l'Union européenne, y compris la Pologne, ont érigé des clôtures ; un mur est en train de se construire ...<br /></li>
</ul>
<p><br /></p>
<ul>
<li>Dans le camp de Fort Bliss au <ins>Texa</ins>s, monté à la hâte par l'administration Biden, les jeunes migrants sont entassés, surexposés au Covid-19 et mal nourris, selon plusieurs témoignages. Des employés font par ailleurs état de violences sexuelles.<br /></li>
</ul>
<p><br /></p>
<h4>Commentaire de Luis :<br /></h4>
<p><q><em>Les parallèles proposées entre les difficultés successives rencontrées par Blanche Neige et celles que doivent affronter les migrants me paraissent très bien illustrer ce que peuvent nous apporter les contes : des messages universels, intemporels, supportés par un imaginaire et qui, sans être immédiatement explicites, s'adressent plus profondément à nos inconscients, et ainsi démultiplient leurs effets.</em></q><br />
<br />
<q><em>Je suis d'accord avec toi sur l'ensemble des enseignements que tu tires de ces parallèles : fuir pour sauver sa vie, dureté des conditions d'accueil, la vie malgré tout qui reprend malgré l´adversité, la justice qui finira par triompher ...</em></q><br /></p>
<p><img src="http://infodoc.blog.free.fr/public/POP-PHILOSOPHIE/ESPOIR_PAPILLON.jpg" alt="Espoir_chenille_Papillon" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Espoir_chenille_Papillon, janv. 2022" /></p>
<p><q><em>Je suis particulièrement sensible au message du Rabbin : voir le jour se lever quand on reconnaît chez l´étranger son frère. C'est cette vérité qu'il me paraît le plus nécessaire de proclamer.</em></q> <br /></p>
<p>Conte à découvrir ci-dessous ...<br />
<br />
<br /></p>
<h2>En conclusion : un conte - - - - - - - - - - - - - - - - - - -</h2>
<p>Ce conte nous montre la véritable valeur de ce qu'on voit <em>a priori</em> comme étranger : il nous est bien plus proche qu'on ne pense. Changer le regard que nous portons sur lui éclairera notre vie, éclairera le monde.<br /></p>
<h4><strong>Le jour se lève</strong></h4>
<blockquote><p>On raconte qu’un soir, un rabbin interrogea ses étudiants :<br />
- <em>A quel signe sait-on que la nuit se dissipe et que le jour se lève ?</em><br />
<img src="http://infodoc.blog.free.fr/public/Nature/Canada_montagne_lever_de_soleil_m.jpg" alt="Mont Baker vu de Victoria, en Colombie-Britannique, Canada" style="display:block; margin:0 auto;" title="Mont Baker vu de Victoria, en Colombie-Britannique, Canada, fév. 2016" />
Long silence ... ... ... ...<br /></p></blockquote>
<blockquote><p>Un jeune homme dit : <br />
- <em>Si l’on peut distinguer un chien d’une brebis, alors on voit, on sait. Il fait jour. C’est le signe.</em><br />
Le rabbin fait non de la tête .<br />
- <em>Enfants, dit-il, cherchez plus haut.</em><br />
Nouveau recueillement, murmures. <br /></p></blockquote>
<blockquote><p>Une voix timide se risque :<br />
- <em>La nuit, je vois deux arbres. Qui sont-ils ? Je ne sais. Le ciel pâlit, je les distingue. Là un cèdre, là un figuier. Le jour se lève. C’est le signe.</em><br />
- <em>Non et non,</em> répond le rabbin. <em>Interrogez vos cœurs, ils savent.</em><br />
On se consulte du regard, on ne sait pas. <br /></p></blockquote>
<blockquote><p>Le rabbin dit :<br />
- <strong><em>Lorsque vous rencontrez un visage étranger et que vous voyez votre frère, en vérité voilà le signe que le jour vient de se lever.</em></strong><br /></p></blockquote>
<p><br />
Ne nous contentons pas de faire la différence entre ceux qui mènent le monde et "les moutons". Ni entre deux espèces d'êtres vivants. Au lieu de voir les différences, acceptons-nous les uns les autres comme faisant partie d'une même famille. A ce moment-là, la lumière qui vient du cœur nous sort de l'obscurité : le jour se lève.<br />
<br />
<img src="http://infodoc.blog.free.fr/public/Nature/lever_de_soleil-Elsa_Courtier_Hermantier-x450.jpg" alt="Lever de soleil-Elsa Courtier Hermantier" style="display:block; margin:0 auto;" title="Lever de soleil-Elsa Courtier Hermantier, janv. 2022" /></p>
<p><ins>Source :</ins><br /></p>
<ul>
<li>Henri Gougaud, Le jour se lève, <em>Petits contes de sagesse pour temps turbulents</em>, Albin Michel, 2013, p 30.<br /></li>
</ul>
<p><br />
<ins>Illustration :</ins><br /></p>
<ul>
<li>Lever de soleil : Mont Baker vu de Victoria, en Colombie-Britannique, Canada</li>
<li>Lever de soleil sur la mer Méditerranée : Elsa Courtier Hermantier <br /></li>
</ul>
<p><br /></p>
<h4>Une intégration possible</h4>
<p>Le conte ci-dessus annonce un jour nouveau pour celui qui accepte l'autre comme son frère. <br /></p>
<p>Sociologue, philosophe, ancien résistant, chercheur et écrivain, <ins>Edgar Morin</ins> est l’un des plus grands intellectuels français du XXe siècle. Il estime nécessaire une réforme de la pensée pour construire un nouveau monde, et invite à ne pas perdre notre capacité d'émerveillement. Il nous rappelle que <q><em>la prise de conscience essentielle n'est pas de rêver d'une autre société. Il s'agit de savoir que nous sommes dans l'aventure humaine</em></q>.<br /></p>
<blockquote><p><em><strong>L’idée atroce est celle de l’exclusion.</strong> Les identités sont faites d’intégration. Au fond de mon « je », de mon « moi », il y a d’autres « moi ». Il y a mes parents qui ne sont pas moi – je porte le nom d’une famille de gens que je n’ai même jamais connus. Il y a aussi l’influence de ceux qui l’ont nourri, qui sont en moi, tous ceux qui entrent dans le moi, dans le « je », qui peuvent enrichir mon identité.</em><br />
<em>Un monde où l’on ne comprendrait pas l’autre, où on le verrait comme ennemi, où l’on se fermerait à lui est un monde de l’horreur. Je pense que l’ouverture à soi et l’ouverture à l’autre sont effectivement deux faces de la même chose.</em><br /></p></blockquote>
<p><br />
Edgar Morin, <em>Dialogue sur notre nature humaine – l’unité dans la diversité</em>, Boris Cyrulnik et Edgar Morin, Marabout, 2018, p 87 <br /></p>
<h4>Commentaire de Luis :</h4>
<p><q><em>Quand j'étais enfant, à l'école, on nous apprenait encore qu'il y avait des races. Les Blancs, les Noirs, les Asiatiques ... Non, il n´y a qu'une race, la race humaine. Et nous sommes tous frères.</em></q> <br />
<br />
<q><em>Plongeant maintenant dans la réalité et le pragmatisme, nous sommes confrontés à notre devoir d'agir. Reconnaître qu'il n'y a qu'une race humaine est une chose, mais en rester là ne rien faire et même parfois faire la morale aux autres est insupportable. C'est se donner bonne conscience à peu de frais. Ah ! La bonne conscience !</em></q><br />
<br />
<q><em>J'ai vécu les deux facettes : fils de migrants, ayant connu le racisme quand j'étais enfant. Puis, ce pays la France, qui est devenu mon pays, qui m'a adopté comme son fils, m'a donné accès à toutes les formations sans que jamais je ne ressente la moindre restriction due à mes origines ou à mon nom à consonance étrangère.</em></q> <br />
<br /><br /></p>
<h2>Autres contes, autres pistes - - - - - - - - - - - - - - - -</h2>
<p>Le thème de l'exil a été traité, au moins en partie, dans deux billets précédents :</p>
<ul>
<li><a href="http://infodoc.blog.free.fr/index.php?post/2020/11/24/E-...-comme-Exil-Une-double-culture">E ... comme Exil - Une double culture</a>, Patricia, novembre 2020</li>
<li><a href="http://infodoc.blog.free.fr/index.php?post/2020/11/08/E-...-comme-exil">E ... comme Exil - Partir pour mieux se trouver ?</a>, Patricia, novembre 2020</li>
</ul>E ... comme Exil - Une double cultureurn:md5:f287629c03b2fe230e3c3168d3eae6f52020-11-24T11:05:00+00:00patricia gustinCONTES : Sagesse des Fous ou Folie des Sageschoixconte de sagesseDiableexilpeurSalomon<p><em>L’homme à deux têtes</em>, dessin de Aislin (alias Terry Mosher), <a href="http://collections.musee-mccord.qc.ca/fr/collection/artefacts/M988.176.355">Musée McCord</a>.
<img src="http://infodoc.blog.free.fr/public/Insolite/Deux_tetes-musee-240.jpeg" alt="L'homme à deux têtes-Asilin-Musée McCord" style="float:left; margin: 0 1em 1em 0;" title="L'homme à deux têtes-Asilin-Musée McCord, nov. 2020" /><br /></p>
<p>Venir d'un pays pour vivre dans un autre c'est un voyage AVEC bagages : on emporte avec soi - qu'on le veuille ou non - sa culture, les souvenirs liés à l'histoire familiale, sa langue, une manière d'être, une sensibilité différente.</p>
<p>Un conte tiré du recueil <em>Contes du Talmud</em>, <strong><em>L'homme à deux têtes</em></strong> nous parle d'un homme venu d'ailleurs, possédant deux têtes, qui au lieu de se réclamer deux va s'assumer un ... grâce à l'aide du sage Salomon.<br />
<br />
<strong>Et cric, et crac !</strong><br />
<br /></p> <h3>L'homme à deux têtes</h3>
<p><ins>Adaptation personnelle</ins>, d'après la retranscription de Catherine Zarcate, '<strong>'L'homme à deux têtes''</strong>, conte inclus dans le recueil <em>Cœur de Conteurs</em>, Syros Jeunesse, 2000. <q> Cette histoire étrange me fait irrésistiblement penser à E.T. ! Pourtant elle a plus de 2500 ans.</q>(C. Zarcate). Ce récit est inspiré d'un conte extrait des <em>Contes du Talmud</em>, Lattès, collection Judaïques 1980.</p>
<blockquote><p><img src="http://infodoc.blog.free.fr/public/LEGENDES/Salomon-Gustave_Dore-wikipedia.jpg" alt="Salomon, roi- Gustave doré-wikipedia" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Salomon, roi- Gustave doré-wikipedia, nov. 2020" />En ce temps-là, le roi Salomon, connu pour la justesse de ses jugements, régnait sur Jérusalem.<br /></p></blockquote>
<blockquote><p>Un jour, <strong>Salomon, le prince de la lumière, invite Asmodée</strong>, plus connu sous le nom de Belzébuth,<strong> le prince des ténèbres</strong>, le plus puissant des génies, qui régnait sur le monde obscur et faisait trembler les humains. Par curiosité ? Pour se mesurer l'un à l'autre ? Le pouvoir de Salomon était immense, il comprenait le langage des animaux, pouvait ordonner ce qu’il voulait au ciel et à la terre, mais aussi à tous les génies qui peuplent l’invisible. <br />
<br />
Salomon et son opposé, le Diable, s’asseyent l’un en face de l’autre ; ils se jaugent réciproquement. Salomon semble fasciné par son hôte. Asmodée regarde alors Salomon d’un air terrible et lui dit :<br />
- <strong><em>Ô mortel veux-tu voir quelque chose que tu n’as jamais vu ?</em></strong><img src="http://infodoc.blog.free.fr/public/LEGENDES/Asmodee-bras-ciel-simon-o-rourke-x320.jpg" alt="Asmodée-bras tendu-Simon o'Rourke" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Asmodée-bras tendu-Simon o'Rourke, nov. 2020" /><br />
Salomon, curieux d'apprendre une chose nouvelle, acquiesce. <br />
<br />
D’un geste brusque, <ins>Asmodée tend son bras vers le ciel</ins>. <em>Son bras s’allonge, s’allonge, s’allonge, jusqu’à dépasser le toit, s’élance dans l’infini du ciel, dépasse la lune, la voie lactée, quitte notre galaxie, atteint un monde inconnu, et là, comme on cueille un fruit, ploup ! saisit <strong>un habitant d’une planète éloignée</strong> et le redescend là, juste devant le roi Salomon !</em><br />
<br />
C’était un homme apparemment semblable à tous les hommes vivant sur terre, mais il avait <strong>deux têtes</strong> !!! Il gémissait à fendre l’âme en tentant de se protéger de la lumière du soleil. Salomon, émerveillé, lui posa mille questions sur son monde, sur la manière de vivre de son peuple, et l’homme répondait à tout en gémissant, parce qu’il avait mal, à cause de notre soleil plus puissant que celui de sa planète. Salomon eut pitié de lui et voulut faire cesser son supplice. Il demanda à Asmodée de renvoyer cet homme à deux têtes sur son monde.<br />
Asmodée éclata d’un rire sinistre :<br />
- <em>Ah ! ça, je ne peux pas ! Je ne sais pas le faire !</em><br />
Salomon non plus ne savait pas ! … Il était bien embêté …<br /></p></blockquote>
<blockquote><p><img src="http://infodoc.blog.free.fr/public/Insolite/Homme-deux-tetes-Richard_Gunther.png" alt="Homme à deux têtes-https://www.christart.com/clipart/image/double-headed" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Homme à deux têtes-https://www.christart.com/clipart/image/double-headed, nov. 2020" /><strong>C’est ainsi que l’homme à deux têtes dut rester sur notre monde, bon gré mal gré</strong>. Salomon, plein de pitié pour ce pauvre exilé, lui offrit une ferme avec de bonnes terres à labourer, des vaches et des moutons. <ins>Au bout de quelque temps, l’homme finit par s’habituer un peu et se maria</ins> avec une femme du pays qui sans doute trouvait amusant d’avoir un mari à 2 têtes et 4 oreilles ; bien qu'elle eut seulement une bouche et une langue, cet homme lui convenait tout à fait : 4 oreilles pour l'écouter et deux paires d'yeux pour la regarder … Ils eurent <strong>sept enfants : six comme leur mère, avec une seule tête, et un comme son père, avec deux têtes.</strong><br /></p></blockquote>
<blockquote><p>Au bout de quelques années, l’homme à deux têtes <ins>mourut prématurément</ins>, sans doute parce qu<ins>’il ne s’était jamais habitué vraiment à notre monde et à sa lumière</ins> … C’est alors que survint <strong>une querelle entre les frères, à propos de l’héritage</strong>. Celui qui avait deux têtes disait :<br />
- <em>Nous sommes huit : je compte pour deux ! J’ai droit à deux parts !</em> <br />
Mais les autres répondaient :<br />
- <em>Nous sommes sept et tu comptes pour un ! Comme tout le monde !</em> (hormis les femmes enceintes ...)<br /></p></blockquote>
<blockquote><p><ins>Finalement, ils allèrent trouver Salomon</ins> et lui firent remarquer, qu’après tout, il était responsable de ce qui arrivait maintenant :<br />
- <em>Salomon, roi de justice, juge entre nous ! Sommes-nous sept ou huit ?</em><br />
Salomon était bien embêté … Comment juger une telle affaire ? Il demanda aux jeunes gens de lui laisser une nuit de réflexion et de revenir le lendemain.<br /></p></blockquote>
<blockquote><p><ins>Le lendemain</ins>, Salomon s’adressa à celui qui avait deux têtes et lui proposa ceci :<br />
-<strong> <em>Je vais te bander les yeux et procéder à un test scientifique en double aveugle ... Si je fais quelque chose à une de tes têtes et que l’autre ne sent rien, vous êtes deux, mais si tes deux têtes sentent ce que je fais, tu es un. Es-tu d’accord ?</em></strong><br />
- <em>D’accord …</em> répond le gars, un peu inquiet tout de même …<br />
Salomon lui bande les yeux sur ses deux têtes ; par un signe discret à un serviteur, il se fait apporter... <strong>une casserole d’eau bouillante</strong> ... Il commence à verser quelques gouttes sur le crâne d’une des têtes ... Notre homme, part en courant, hurlant :<br />
- <em>Pas besoin de faire d'autres tests ! Je suis un ! Je suis un ! Nous sommes sept, d’accord, d'accord ! Nous sommes sept ! Ouh la la la la ..</em><br /></p></blockquote>
<blockquote><p>C’est ainsi que Salomon résolut cet étrange problème de justice qu’il avait lui-même provoqué quelques années auparavant !<br /></p></blockquote>
<p><br />
<br /></p>
<p><ins>Illustrations :</ins><br /></p>
<ul>
<li><em>Salomon roi</em>, Gravure de Gustave Doré (1832-1883)<br /></li>
<li><em>La main géante de Vyrnwy</em>, une main de 15 mètres de haut, tendue au sommet d'un tronc : Simon o'Rourke. <a href="https://www.demotivateur.fr/article/il-transforme-un-arbre-endommage-par-une-tempete-en-une-sculpture-de-15-metres-de-haut-22872">https://www.demotivateur.fr/article/il-transforme-un-arbre-endommage-par-une-tempete-en-une-sculpture-de-15-metres-de-haut-22872</a>, publié vendredi 30 octobre 2020. <em>L'arbre avait été endommagé par une tempête et allait être abattu, jusqu'à ce que le sculpteur intervienne. La sculpture a été créée à partir de la souche de l'arbre et représente une main tendue vers le ciel. Plus le bois monte, plus l'écorce se détache, ce qui forme la peau du bras.</em> <br /></li>
<li><em>Homme à deux têtes</em> : Richard Gunther, https://www.christart.com/clipart/image/double-headed</li>
</ul>
<p><br /></p>
<p><ins>Voir aussi :</ins><br />
<img src="http://infodoc.blog.free.fr/public/couvertures/contes-des-sages-du-Talmud_FDIDA-Seuil_2018_x150.jpeg" alt="Contes des sages du Talmud, FDIDA, Seuil, 2018" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Contes des sages du Talmud, FDIDA, Seuil, 2018, nov. 2020" />Le livre cité en référence par Catherine Zarcate n'étant plus disponible (Contes du Talmud, Léon Berman, JC Lattès, 1980), on pourra consulter avec profit <em>Contes des sages du Talmud,</em> Jean-Jacques Fdida, collection Contes des Sages, Seuil, 2018<br />
<ins>Présentation de l'éditeur :</ins><br />
<q>Les Contes des sages du Talmud s'inspirent de sources orales savantes mises en écriture entre le Ier et le VIe siècle, très partiellement traduites, peu diffusées, et dont le mystère a pourtant provoqué par-delà la tradition juive un attrait quasiment universel. À proprement parler, il s'agit de récits dits haggadiques ou midrashiques, c'est-à-dire d'histoires donnant matière à éveil sur les sujets les plus variés, des plus sérieux aux plus farfelus, et ayant toujours la sagesse en ligne de mire.</q><br />
<q>Se donnant des airs de fiction avouée ou empruntant au contraire la voie de faux-semblants historiques, ces récits oscillent sans complexe entre strict réalisme et pure invraisemblance, dans le souci sans foi ni loi de donner du sens, ou tout du moins matière à réfléchir. Suivant un ordre chronologique couvrant plusieurs générations de sages, le recueil peut s'ouvrir à n'importe quelle page, et donne à découvrir en chacune de ses sous-parties des récits distincts</q>.<br />
<q>Autour des figures d'une dizaine de grands érudits, l'auteur fait ressurgir de l'hébreu ancien et de l'araméen quelques perles de cette tradition, en s'inspirant aussi des commentaires qui y sont associés pour en exprimer à la fois sens et saveur.</q><br />
<br /></p>
<p><ins>Que penser de ce conte ?</ins><br /></p>
<ul>
<li><em>Se sentir partagé(e) entre deux cultures est une position difficile, intenable, douloureuse</em>. Surtout pour les déracinés involontaires (comme l'homme à deux têtes du conte).</li>
<li><em> Un choix s'impose</em> ; cela se fait le plus souvent naturellement lorsque le jeune homme (ou la jeune fille) choisit de vivre le moment présent, à l'endroit présent, en choisissant de se définir comme membre du pays d'adoption. Cela ne signifie pas renoncer à ses origines, à sa famille, mais plutôt intégrer une communauté de vie en dehors de la famille traditionnelle, pendant ses études, dans la vie active, ses amours ...</li>
<li><em> Si le choix ne se fait pas spontanément par l'exilé, le roi (la loi) peut intervenir et précipiter le choix.</em></li>
<li><em>Celui qui ne peut choisir d'intégrer ce nouveau pays se condamne à vivre dans le passé, le regret, la nostalgie</em> en idéalisant ce qu'il a quitté faute d'accepter de vivre au présent une nouvelle vie dans un nouveau lieu.</li>
<li><em>Ce choix peut être douloureux</em> (brûlant comme dans le conte) mais permettra de se sentir unifié. S'il s'agit de faire sien ce nouveau pays avec son mode de vie, il sera ainsi reconnu par la société dans laquelle vit "l'homme à deux têtes", à deux cultures, l'exilé qui s'est construit à partir de deux pays ... A défaut de cette acceptation, il aura beaucoup de mal à trouver sa place dans la société et quel sens donner à sa vie ? Transmettre les vieilles traditions familiales est intéressant, porteur, nécessaire si cette culture n'est pas imposée à la génération suivante, mais cette démarche faiti vivre dans le passé. Comment vivre a présent si on est constamment "ailleurs" ?<br /></li>
<li><em>La difficulté du choix résulte le plus souvent de la peur</em> : peur de perdre l'affection de sa famille, peur d'oublier ses racines, peur de l'inconnu, peur de ne pas intégrer vraiment ce nouveau pays, peut de ne pas réussir sa vie ... une fois la peur dépassée, le choix s'assume, le chemin se déroule sous les pieds du voyageur, à travers le temps et l'espace.</li>
</ul>
<p><br /></p>
<p><ins>En musique :</ins><br /></p>
<ul>
<li><em>J'ai deux amours, mon pays et Paris</em> chantait Joséphine Baker, paroles de Alibert. Premier enregistrement en 1930.<br /></li>
</ul>
<div class="external-media" style="margin: 1em auto; text-align: center;">
<iframe width='80%' height='150%' frameborder='0' marginheight ='0' marginwidth='0' scrolling ='no' src='https://player.ina.fr/player/embed/I06278690/1/1b0bd203fbcd702f9bc9b10ac3d0fc21/wide/1' allow ='fullscreen,autoplay'></iframe>
<br /><a href="https://player.ina.fr/player/embed/I06278690/1/1b0bd203fbcd702f9bc9b10ac3d0fc21/wide/1">Josépĥine Baker - J'ai deux amours - 1968 - Archives INA </a>
</div>
<ul>
<li>Cette chanson a été reprise par Madeleine Peyroux (en changeant <em>ma savane</em> en <em>Manhattan</em> ...). Pour l'écouter cliquez <a href="https://www.youtube.com/watch?v=RwydnSazD08">ici</a> <br /></li>
</ul>
<p><br /></p>
<ul>
<li>Reprise d'une chanson d'Enrico Macias : <em>J'ai quitté mon pays</em>. Pour l'écouter cliquez ici <a href="https://www.youtube.com/watch?v=4EdrzJyN7pg&feature=share&fbclid=IwAR0wokV__KrKsVL9uIo55guCW-oEZNbeACZU8jwogVORUhXywv0MA5nnbZk">El Sebastiano - J'ai quitté mon pays</a> . <br /></li>
</ul>
<p><br /></p>
<h3>Un choix difficile</h3>
<p>Un conte des 1001 nuits illustre bien ce problème : la peur des apparences empêche de choisir sa voie.<br />
<br /></p>
<blockquote><p>Il était une fois, un roi très critiqué pour ses actes de guerre. Une fois qu’il avait fait prisonniers tous ses ennemis, il les conviait dans une grande salle et criait : <br />
– <em><strong>Je vais vous donner une dernière chance</strong>.<img src="http://infodoc.blog.free.fr/public/CONTES/.archer_chinois_1900_Boxer_s.jpg" alt="archer_chinois_http://fr.academic.ru/dic.nsf/frwiki/784426#Asie_du_Nord" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="archer_chinois_http://fr.academic.ru/dic.nsf/frwiki/784426#Asie_du_Nord, janv. 2011" /> Regardez tous à droite.</em> <br />
Tous tournaient la tête vers une rangée de soldats armés d’arcs et de flèches, prêts à leur tirer dessus. <br /></p></blockquote>
<blockquote><p>– <em>Maintenant</em>, disait le roi, <em>regardez tous à gauche.</em> <br />
Dans cette direction, les prisonniers pouvaient apercevoir une gigantesque porte noire incrustée de crânes humains sanguinolents, de mains décharnées, de morceaux de cadavre. Une porte digne des Enfers. Quelles horribles tortures se cachent derrière cette porte ? <img src="http://infodoc.blog.free.fr/public/ARTS/La_Porte_de_l__enfer_RODINx300.JPG" alt="RODiN-La porte de l'enfer" style="float:left; margin: 0 1em 1em 0;" title="RODiN-La porte de l'enfer, nov. 2020" /><br /></p></blockquote>
<blockquote><p>Le roi se place alors au centre de la salle et leur demande de choisir : <br />
– <em><strong>Que choisissez-vous ? Mourir transpercés par les flèches de mes archers, ou tenter votre chance et passer le seuil de la porte noire ?</strong> Décidez-vous, je respecterai le choix de votre libre arbitre…</em><br /></p></blockquote>
<blockquote><p>Les prisonniers approchent de la porte géante, lui jettent un regard tourmenté, reculent les uns après les autres, baissent la tête, résignés :<br />
–<em> Nous préférons mourir sous tes flèches !</em><br />
<strong>Pas un d'entre eux n'osa ouvrir la porte, la peur de l'inconnu, la peur de souffrir, était trop grande.</strong> <br /></p></blockquote>
<blockquote><p>Une fois la guerre terminée, un soldat qui faisait partie autrefois du peloton d’exécution des archers, ose interroger le roi : <br />
– <em>Ô grand roi, je me suis toujours demandé ce qu’il y avait derrière la porte noire.</em><br />
Le roi le regarde dans les yeux, voit son regard clair, et lui offre de trouver lui-même la réponse : <br />
– <em>Tu te souviens que je donnais le choix aux prisonniers ? Ils pouvaient pousser la porte ou opter pour une mort certaine. Eh bien, toi, va ouvrir la porte noire !</em><br />
Le soldat frémit mais pousse courageusement la porte noire ... elle tourne en grinçant sur ses énormes gonds ... Un rayon de soleil balaye le sol dallé. Le soldat ouvre la porte en grand. Une belle lumière inonde la salle. Elle provient d’un paysage verdoyant. Un chemin monte au milieu des arbres. Le soldat comprend : ce chemin, c’est celui de la liberté ! Et il franchit la porte ...<br /></p></blockquote>
<p><br /></p>E ... comme Exil - Partir pour mieux se trouver ?urn:md5:155a614a0b399849d6bcd7d474ab53042020-11-08T12:45:00+00:00patricia gustinPetits contes de sagesseCONTEconte de sagesseexilORIENTrêve<p><img src="http://infodoc.blog.free.fr/public/CONTES/.poesieroute_s.jpg" alt="http://www.ossiane.net/images/poesieroute.jpg" style="float:left; margin: 0 1em 1em 0;" title="http://www.ossiane.net/images/poesieroute.jpg, mar. 2010" />Ne vous est-il jamais arrivé de ne pas vous sentir à votre place ? au point d'avoir une envie irrépressible d'aller voir plus loin ?<br /></p>
<p>Même (et surtout) quand on est confiné, l'envie de partir (loin de préférence) peut s'emparer de nous.<br /></p>
<p>En changeant de lieu on espère changer ses conditions de vie. C'est parfois nécessaire (misère, guerre, manque de liberté ou de possibilités ...).<br /></p>
<p>Mais pour bien vivre ce déracinement, encore faut-il vivre cet exil comme un choix personnel et non le subir avec regret.<br />
<br />
Cependant, la plupart du temps, le chemin a pour fonction de nous amener à nous changer nous-même ; au minimum, il s'agit de changer le regard qu'on porte sur soi et le monde afin mieux voir où sont les vrais valeurs, nos trésors enfouis en nous-mêmes. <br />
<br />
Deux contes peuvent éclairer notre chemin ... <br /></p>
<ul>
<li><strong>Les deux voyageurs</strong></li>
<li><strong>Le trésor du rêve</strong><br /></li>
</ul>
<p><br />
<strong>Et cric et crac !</strong><br /></p> <p><strong>Est-ce que tout changera si l'on change de lieu de vie ?</strong><br /></p>
<h3>Les deux voyageurs</h3>
<blockquote><p><img src="http://infodoc.blog.free.fr/public/CONTES/.Ville_d__Orient_m.jpg" alt="Orient_Courelle2" style="display:block; margin:0 auto;" title="Orient_Courelle2, déc. 2011" /><br />
Il était une fois un vieil homme assis à l’entrée d’une ville.<br />
Un voyageur s’approche de lui et lui dit : <br />
- <em>Je ne suis jamais venu ici. Comment sont les gens dans cette ville ?</em><br />
Le vieil homme, un sage, lui répond en miroir, par une question : <br />
- <em>Comment étaient les gens dans la ville d’où tu viens ?</em><br />
- <em>Égoïstes et méchants, c’est la raison pour laquelle j’étais bien content de partir</em>, dit le jeune homme à l'air las.<br />
- <em>Tu trouveras les mêmes gens ici.</em>
Le jeune homme soupire et rentre dans la ville, tendu, sur ses gardes.<br /></p></blockquote>
<blockquote><p>Un peu plus tard, arrive un autre voyageur qui lui pose la même question :<br />
-<em> Je viens d’arriver dans la région. Comment sont les gens qui vivent dans cette ville ?</em> <br />
Le vieil homme répond comme précédemment, par la même question :<br />
- <em>Dis-moi mon garçon, comment étaient les gens dans la ville d’où tu viens ?</em><br />
- <em>Ils étaient aimables et accueillants. J’avais de bons amis et j’ai eu du mal à les quitter</em>, répond le jeune voyageur.<br />
- <em>N'aie crainte, tu trouveras ici les mêmes</em>, répond le vieil homme en souriant derrière sa barbe.<br />
Radieux, le second voyageur entre dans la ville avec le sourire, prêt à faire de belles rencontres.</p></blockquote>
<blockquote><p>Un marchand qui faisait boire ses chameaux non loin de là a entendu les deux conversations. Dès que le deuxième étranger s’est éloigné, il s’approche du vieux sage et, troublé, sur un ton de reproche bien que respectueux, lui demande :<br />
- <em>Comment peux-tu donner deux réponses aussi différentes à la même question ?</em><br />
- <em>C'est simple : chacun porte en lui sa vision du monde. <strong>Celui qui n'a rien trouvé de bon dans son passé ne trouvera rien de bon ici non plus. Celui qui avait des amis loyaux dans l'autre ville trouvera des amis loyaux et fidèles ici ; car chaque être humain a tendance à voir dans les autres ce qu'il est en son propre cœur</strong></em> <br /></p></blockquote>
<p><ins>En conclusion :</ins><br /></p>
<p><q><em>Celui qui ouvre son cœur change aussi son regard sur les autres.</em></q><br />
<br /></p>
<p><ins>Sources :</ins><br /></p>
<ul>
<li>Conte soufi en ligne : http://jacques.prevost.free.fr/cahiers/cahier_48.htm#a4</li>
<li>Extrait du livre de Frédéric Lenoir sur le Bonheur « Du Bonheur, un voyage philosophique » édition Fayard.<br /></li>
</ul>
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<h3>Le trésor du rêve</h3>
<blockquote><p><ins>Dans la ville d’Ispahan</ins>, vivait autrefois <strong>un paysan miséreux</strong>. Il n’avait qu’une pauvre maison basse couleur de terre, un champ de cailloux avec une source et un figuier. Il reposait sous son figuier quand <strong>un rêve</strong> lui vînt.<br />
<img src="http://infodoc.blog.free.fr/public/CONTES/.pieces_or_s.jpg" alt="http://www.usagold.com/images/gold-coins-bullion.jpeg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="http://www.usagold.com/images/gold-coins-bullion.jpeg, déc. 2009" />Il cheminait dans une cité magnifique aux riches boutiques. Au loin, on voyait des palais couleur d’or. Parvenu au bord d’un fleuve, il s’avança sur le pont et, au pied de la première borne, il y avait <strong>un grand coffre empli d’or et de pierres précieuses</strong>. Une voix lui dit : <ins>''Tu es ici dans la cité du Caire</ins>, en Égypte, et ces biens seront à toi.''
Sur ses paroles entendues en rêve, il s’éveilla sous son figuier. Ce rêve était tellement fort qu'il pensa que c'était un message personnel qui lui était adressé de l'au-delà.<br /></p></blockquote>
<blockquote><p><ins>Il s’en alla sur l’heure pour chercher le trésor.</ins> Le voyage fut périlleux, mais il parvint enfin au <ins>Caire, la ville qu'il avait rêvée</ins> ; c'était comme dans son rêve les mêmes rues, les mêmes boutiques, et les mêmes coupole dorées, au loin. Il parvint au bord du même fleuve et du même pont, et à son entrée, la même borne. Mais il n'y avait là qu’un mendiant qui tendait la main. Pas de trésor, hélas. <br />
Le paysan est désespéré.<br />
- <em>Á quoi bon vivre. Plus rien de bon ne peut m’advenir dans ce monde</em>.<br />
Il tente de se jeter dans le fleuve. Le <strong>mendiant</strong> le retient :<br />
- <em>Pourquoi mourir, par un si beau temps ?</em> <br />
Le paysan raconte son rêve, son espoir, et son long voyage. Alors le mendiant se met à rire :<br />
- <em>Voilà le plus grand idiot de la terre. Quelle folie qu'un tel voyage sur la foi d’un rêve ! Auprès de toi, je me sens fort sage. <ins>Toutes les nuits je rêve que je suis dans une ville inconnue dont le nom est Ispahan</ins>. J'y vois une pauvre maison basse couleur de terre, un champ de cailloux avec une source et un figuier. Je creuse un trou au pied du figuier, et je trouve un coffre empli d’or et de pierres précieuses. Ai-je jamais couru vers ce mirage ? Non, Je suis raisonnable, et je reste à mendier sur ce pont. "Songe est mensonge", dit le proverbe. Tu aurais dû demeurer où Dieu t’a mis. Va, et sois moins naïf à l'avenir !</em> <br /></p></blockquote>
<blockquote><p>Le paysan avait reconnu sa maison, son figuier !!! <br />
<ins>Il retourne à Ispahan</ins>, creuse au pied du figuier, et découvre un immense <strong>trésor</strong> ...</p></blockquote>
<p><ins>Sources :</ins><br /></p>
<ul>
<li>http://jacques.prevost.free.fr/cahiers/cahier_48.ht<br /></li>
</ul>
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<ul>
<li><img src="http://infodoc.blog.free.fr/public/couvertures/conteuramoureux.jpg" alt="Bruno-de-la-Salle_Le-conteur-amoureux" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Bruno-de-la-Salle_Le-conteur-amoureux, avr. 2010" /> Bruno de La Salle, <em>Le trésor du rêve</em> dans le recueil "Le conteur amoureux", Casterman, 1995, pp 89-93. Je vous confie l’introduction et la conclusion de la version de Bruno de La Salle. A rêver et à méditer ... <br /></li>
</ul>
<blockquote><p><em>Dans un pays grand comme un mouchoir de poche, tout près d'une rivière large comme un brin de fil, il y a un homme doux et tranquille qui ne fait pas beaucoup de bruit.</em><br />
<em>C'est un paysan dans une campagne reculée, il s'appelle Murmure.</em><br />
<em>Beaucoup travailler, presque rien à manger, rien à gagner, beaucoup de dettes à payer.</em><br />
<em>De ce que son père lui a donné, il ne lui reste que sa maison blanche en terre battue avec sa porte peinte en bleu et son toit de paille abîmé.</em><br />
<em>Il se sentait bien dedans mais maintenant il a envie de s'en aller.</em><br />
<em>A peine rentré, à peine couché, il fait un rêve, toujours le même, le même tous les jours de la semaine, le même depuis des années, et quand le rêve est terminé, il ne peut plus se rendormir.</em><br /></p></blockquote>
<blockquote><p><em>Le rêve est si différent de sa pauvre réalité que tout d'un coup il voit toute la misère dont il ne peut pas se tirer</em>.<br />
<em>Alors il attend le jour, et dès que celui-ci vient, il se remet à travailler.</em><br /></p></blockquote>
<p>...................................................................................................................................<br /></p>
<blockquote><p><em>Et le paysan ne peut pas s'empêcher de regarder, de vouloir savoir si le rêve peut ressembler à la réalité.</em><br />
<em>Alors il ferme la porte de sa maison, il s'en va sur le chemin.</em><br />
<em>Et le paysan qu'il a été, il va devenir sans pays, mendiant, chevalier de la fortune, immigré, regardez-le passer !</em><br /></p></blockquote>
<p>...................................................................................................................................<br /></p>
<blockquote><p><em>Savez-vous si Murmure est rentré chez lui ?</em><br />
<em>S'il a retrouvé sa maison, sa petite maison banche en terre battue ?</em><br />
<em>S'il a poussé sa porte peinte en bleu ?</em><br />
<em>S'il a regardé devant lui</em> ?<br />
<br />
<em>Oui, il a regardé. Devant lui il y a tout ce qu'il avait tant cherché, il y a tout ce qui lui manquait, il y a tout ce qu'il avait et qu'il croyait perdu.</em><br />
<em>Oui, il y a tout ce qu'il pouvait avoir et qu'il n'osait plus espérer.</em></p></blockquote>
<p><br /></p>
<p><ins>Que penser de ce conte ?</ins><br /></p>
<ul>
<li>Partir, c'est parfois chercher bien loin ce que l'on peut obtenir ici même. Mais pour en être conscient, il faut peut-être partir d'abord ?</li>
<li>Faut-il vraiment retourner sur ses pas ? Ne s'agit-il pas plutôt de renouer avec ses racines ? et découvrir tout ce que nos ancêtres nous ont apporté ? C'est un trésor enfoui en nous-mêmes ...</li>
<li>Ne pas écouter les rêves qui constituent le fond de notre personnalité, risque de faire de nous d'éternels insatisfaits de la vie (limités comme le mendiant du conte), comme en exil de nous-mêmes... <br /></li>
</ul>
<p><br />
N'hésitez pas à exprimer votre point de vue en commentaire au bas de cet article. Ce serait marquer le chemin d'un petit caillou blanc ...</p>